En quelques jours, Pokémon Go, le jeu gratuit en réalité augmentée proposé sur smartphone par Nintendo, est devenu un phénomène. D’abord, en faisant passer la valorisation boursière du concepteur de jeux vidéo devant Sony, alors que l’on ne donnait pas très cher de son avenir ces derniers temps. Ensuite, parce que le jeu a littéralement conquis les smartphones du monde entier depuis sa sortie aux États-Unis le 7 juillet. Au point de faire de l’ombre en nombre d’installations et en durée d’utilisation quotidienne à Twitter, Tinder, et même au roi Facebook.
Mais ce premier exemple réussi de mélange entre réel et virtuel – les petites créatures se chassent dans la vraie vie et la vraie ville – n’est pas non plus sans risque. Le jeu vidéo peut même se transformer en véritable danger public, entre imprudences pour aller capturer la bébête de ses rêves, guet-apens et récupération de données. Un peu de prévention avec la sortie officielle imminente de Pokémon Go en France.
1 – Pas de Pokémon sur la route
Même la gendarmerie s’y est mise : « Conseils pour les dresseurs Pokémon. Conducteurs, ne jouez pas à Pokémon Go ! Piétons, redoublez d’attention ! » a-t-elle tweeté. Et elle n’a pas tort : dans le monde entier, les accidents s’accumulent. La raison : le fait que les créatures virtuelles peuvent apparaître n’importe où, y compris dans une rivière ou au beau milieu du chemin, et que les joueurs sont prêts à tout, au-delà de toute prudence, voire du simple bon sens, pour les attraper.
Conseils pour les dresseurs #Pokémon :
– Conducteurs, ne jouez pas à #PokemonGO
– Piétons, redoublez d’attention
En France, la Prévention routière s’en inquiète également dans un communiqué publié le 13 juillet. Elle « demande à ses concepteurs de mettre en place un dispositif qui bloque le jeu lorsque l’utilisateur est en situation de conduite ». Elle souhaite également que les personnages virtuels n’apparaissent plus sur les voies de circulation pour éviter une prise de risque inutile aux joueurs piétons. « Cette application transforme la route et la rue en un immense terrain de jeu, sans se soucier du danger que cela représente, souligne Christophe Ramond, directeur des études et recherches de la Prévention routière. À l’heure où la mortalité routière augmente et que l’on dénombrait près de 3 500 morts et plus de 70 000 blessés en 2015, il nous semble indispensable que les concepteurs de cette application prennent leurs responsabilités et protègent les joueurs et les usagers de la route. » La Prévention routière rappelle au passage qu’il est interdit et dangereux d’utiliser son téléphone en conduisant et lors des déplacements à vélo. Au cas où vous ne l’auriez pas deviné…
Outre-Atlantique, les autorités locales multiplient les avertissements aux imprudents, autour des slogans « Arrête d’attraper et roule » et « Ne joue pas aux Pokémon et conduis », affichés jusque sur les panneaux d’autoroute.
The new craze to hit the world but make sure you#dontpokemonanddrive Never thought I’d write that sentence!
Autumn Deiseroth, de Tarentum, en Pennsylvanie, en sait quelque chose : la jeune fille de 15 ans a été renversée par une voiture alors qu’elle cherchait à attraper des Pokémon. Un jeu virtuel qui a réellement failli lui coûter la vie…
UPDATE: Tarentum teen tells her story after being hit by a car while out playing #PokemonGo: http://cbsloc.al/29KaqjS
À New York, le New York City Transit (l’équivalent de notre RATP) rappelle qu’il vaut mieux éviter de capturer des créatures sous les métros et dans les escaliers mécaniques…
Warnings about playing #PokemonGO are plastered around the New York subway
2 – Attention à la « team racket »
Jouer en ville et à découvert, c’est plus sûr. La fonction de géolocalisation du jeu et les Pokéstops, lieux où trouver des Pokémon, peuvent aussi bien attirer les joueurs… que ceux qui voudraient les alléger de leur smartphone et de leur argent. Ainsi, dans la banlieue de St Louis, aux États-Unis, « en utilisant la fonction de géolocalisation de l’application Pokémon Go, des voleurs ont pu anticiper l’endroit où se trouveraient leurs victimes et leur degré d’isolement », a expliqué la police. Dans le Missouri, quatre adolescents ont profité du jeu pour détrousser une dizaine d’adeptes. « Nous encourageons toutes les personnes jouant à Pokémon Go à prendre conscience de leur environnement et à jouer avec des amis quand elles vont dans des endroits nouveaux ou peu familiers », ont dû réagir, via un communiqué, Pokémon Company International et le développeur Niantic.
Il peut sembler idiot de le rappeler, mais pour jouer à Pokémon Go, des enfants sortent de la maison et du cercle familial. Au risque de rencontrer et d’échanger avec de parfaits inconnus, pas toujours animés des meilleures intentions du monde… Une mise en garde qui peut sembler évidente, mais à rappeler encore et encore aux plus jeunes : le monde, le vrai, n’est pas seulement peuplé de gentils dresseurs et de monstres… Pas question, donc, de se rendre seul(e) dans un parc ou un lieu isolé en pleine nuit pour aller chasser les créatures virtuelles.
3 – Gare aux pirates
Si vous jouez avant la sortie officielle de l’application en France, c’est que vous avez dû vous « débrouiller » pour l’installer. Si vous avez été prudent, vous l’avez fait depuis une source sûre (comme celles proposées dans notre article). Mais sur les smartphones sous Android, certains des fichiers sources (dits APK) proposés au téléchargement sont en fait des chevaux de Troie. Une fois chargés, ils donneront aux hackers un accès complet à votre smartphone, et surtout à vos données personnelles. Ils pourront même, parfois, en prendre le contrôle à distance. Selon l’entreprise de sécurité informatique Proofpoint, il s’agirait souvent d’un malware bien connu, DroidJack, outil d’administration à distance permettant de prendre le contrôle complet du système contaminé. Au moment de télécharger et d’installer, vérifiez bien l’accès aux données demandé lors de l’installation.
4 – Gare à vos données personnelles
La vie privée n’existe plus en ces temps connectés. Bien sûr, nous sommes des millions à en exposer volontairement la majeure partie sur les réseaux sociaux. Mais de nombreuses apps gratuites sur smartphone visent à en savoir plus sur vous, et à faire un usage commercial de votre vie privée : « Si c’est gratuit, c’est vous le produit », dit-on. Or, utiliser le nouveau jeu signé Niantic suppose de donner l’accès complet à votre compte Google, avec toute l’indiscrétion que cela peut induire quant à vos images, vos comportements en ligne et le contenu de vos e-mails. Que le jeu ait en permanence besoin de vous géolocaliser est une chose, donner carte blanche pour avoir accès à vos données en est une autre. Dans un communiqué publié par Re/Code, Niantic s’est justifié : si Pokémon Go a bien accès à l’ensemble des données, l’app n’utilise que les données de base, telles que l’identifiant ou l’adresse e-mail. Dans les futures mises à jour, les permissions accordées à l’app seront revues à la baisse.
5 – Gare aux achats intégrés
Les jeux vidéo gratuits ne le sont bien souvent que partiellement. Souvent, si l’on veut avancer plus vite ou gagner des niveaux, on vous propose des achats intégrés (in app, en anglais). Si vous ne pensez pas, sur un smartphone, à limiter les capacités d’achat, voire à les bloquer, la facture peut très vite monter, tant la tentation de passer des niveaux plus rapidement, ou aussi vite que ses amis, sera forte. D’ailleurs, une des premières études sur le sujet réalisée par Slice Intelligencemontre que Pokémon Go compte plus d’achats intégrés que tout le reste du marché des jeux sur mobile ! Moralité : que ce soit sur iPhone ou sur Android, veillez à activer le système de validation à chaque achat, sinon, gare à la facture en fin de mois.