Derrière les hauts murs de la prison marocaine d’Ain Sebaa, à Casablanca, Khalid, un détenu de 40 ans, se dit « fier » de participer à l’effort de lutte contre la pandémie de coronavirus, en travaillant dans un atelier pilote de fabrication de masques sanitaires.
« Nous avons le sentiment de contribuer à l’effort collectif, même derrière les murs de la prison », confie cet homme qui travaille en blouse blanche, protégé par un masque. La production maison sera bientôt distribuée aux 80.000 détenus du pays.
L’objectif du programme, lancé début mai à Ain Sebaa, la prison la plus peuplée du Maroc avec quelque 8.000 prisonniers, est aussi de « nourrir l’esprit citoyen » des détenus et de les « aider à gérer leur détention pendant le confinement », selon la direction de l’administration pénitentiaire.
Khalid, lui, quitte sa cellule tous les jours pour rejoindre l’atelier de couture en passant par de longs couloirs imprégnés d’une forte odeur de désinfectant. Il passe la journée à s’occuper des finitions, tandis que d’autres découpent le tissu ou emballent les produits dans des sacs plastique.
Dans l’atelier de l’aile réservée aux femmes, Meriem, 35 ans, se dit aussi « heureuse de faire un travail utile aux autres », même avec une « contribution modeste ».
Actuellement, une centaine de prisonniers et prisonnières fabriquent chaque jour 20.000 pièces dans une vingtaine d’établissements pénitentiaires. Une goutte d’eau, comparé aux 10 millions de masques produits quotidiennement dans des usines du pays reconverties pour répondre aux nouveaux besoins nés de la pandémie.
La prison d’Ain Sebaa, où aucun cas de la maladie Covid-19 n’a été recensé, applique « rigoureusement » les mesures de prévention sanitaire, souligne son directeur Abderrahim Kerrari.
Des bacs de désinfection sont disposés à l’entrée principale de l’établissement et dans les espaces menant aux cellules. Les détenus doivent systématiquement décontaminer leurs chaussures et des gels hydro-alcooliques sont disposés sur chaque table de l’atelier de confection.
Ceux qui fabriquent des masques ont reçu une formation de deux jours, mais tous suivaient déjà des ateliers de couture au sein de la prison. L’administration les a sélectionnés pour leur « bonne conduite », en privilégiant les courtes peines, selon M. Kerrari.
Car un des objectifs du programme pilote est de « préparer les détenus à réintégrer la société en leur inculquant des valeurs comme la solidarité », dit-il. Les participants perçoivent une rémunération, dont le montant n’a pas été précisé, en fonction du nombre de jours travaillés.
Les détenus fraîchement formés se voient confier des tâches annexes comme la découpe du tissu. C’est le cas de Wafaa, 37 ans, qui s’est inscrite pour « développer ses compétences et acquérir de l’expérience ».
Dès l’enregistrement du premier cas de coronavirus au Maroc début mars, les autorités ont libérer des détenus pour limiter les risques d’infection dans des prisons. Début avril, plus de 5.000 détenus ont été graciés par le roi Mohammed VI.