Le choix, annoncé mercredi 15 septembre, de l’Australie de rompre un gigantesque contrat conclu en 2016 avec la France pour la fourniture de sous-marins conventionnels, Canberra au profit des sous-marins à propulsion nucléaire à l’aide de technologies américaines et britanniques, a déclenché une importante brouille diplomatique entre Paris et ses alliés mais, surtout, a soulevé des questions sur l’efficacité des renseignements français.
Une double insulte pour la France, qui voit son industrie navale dépouillée d’un contrat d’une valeur à la signature de 50 milliards de dollars australiens (31 milliards d’euros dont 8 milliards pour la partie française), et qui assiste, médusée, à un vaste partenariat de sécurité avec l’Australie et le Royaume-Uni dans la zone indo-pacifique, sans qu’elle n’ait été consultée, malgré son implication dans la région depuis plusieurs années.
Le journaliste Philippe Labro ne cache plus sa colère. «On sait que tout le monde écoute tout le monde. Les alliés, en particulier, s’écoutent entre eux», a-t-il déclaré dans un enregistrement vidéo diffusé par le journal Le Point. L’opération Hookless et l’éviction du français Naval Group dans cette affaire de vente de sous-marins ont été négociées depuis des mois. Le montage tripartite n’a pas été anticipé par les services secrets incapables d’en intercepter les indices. «C’est une faillite des services secrets français», déplore-il.
La valeur de du contrat annulé est désormais estimée à 90 milliards de dollars australiens (56 milliards d’euros) en raison de dépassement de coûts et d’effets de change. La France se prépare à un long contentieux juridique afin de définir le montant de ces pénalités. Alors que les Australiens semblent avoir considéré que leurs intérêts géostratégiques primaient sur le reste, la réputation de la France et l’efficacité de ses renseignements ont été sérieusement écornées.
Le Sénat, qui a fustigé «une décision grave aux conséquences lourdes» et a dit s’interroger sur «la nature exacte» de la relation entre Paris et Washington, alors que la colère gronde après des informations affirmant que même l’UE n’avait «pas été informée» du pacte de sécurité conclu entre les Etats-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni pour la région indopacifique. Sûrement, l’annulation du contrat d’achat de sous-marins français en faveur de navires américains à propulsion nucléaire est une déroute énorme pour les renseignements français.