Tantôt il dit comprendre la colère des marocains et les manifestations de soutien au défunt Mouhcine Fikri victime selon lui d’une « mort injuste », tantôt il reconnait les dysfonctionnements au sein de l’administration dont il affirme ne pas être le chef.
« Les dysfonctionnements de l’administration marocaine sont connus. Le roi lui-même les avait pointés du doigt lors de son discours devant le Parlement, ce qui nous amène à penser qu’il s’agit là de l’une des premières directives adressées au prochain exécutif ».
Tout en se félicitant du bon déroulement « jusqu’à présent » des manifestations, le chef du gouvernement s’en prend à ceux qui l’accusent d’avoir « gardé le silence » face à cet incident tragique, de faire preuve d’immobilisme et d’avoir appelé les militants de son parti à ne pas prendre part aux manifestations.
Il a également réfuté les critiques qui lui reprochent de ne pas s’être déplacé personnellement pour présenter ses condoléances, affirmant qu’il a envoyé trois anciens ministres auprès des proches de la victime qui appartient « à notre parti justice et développement »… « Certes, je n’ai pas bougé personnellement pour des raisons personnelles, mais j’ai envoyé des ministres en plus du président du conseil communal de Tétouan… et je refuse que quelqu’un m’en veuille et dise pourquoi je n’y suis pas allé moi-même (car) j’ai accompli mon devoir parce que c’est un devoir, et non pas pour annoncer une position devant l’opinion publique ce qui est inacceptable ».
A ceux qui lui reprochent d’avoir gardé le silence, Benkirane répond: « je n’ai pas gardé le silence sur cette affaire…le roi a donné ses instructions et nous on les exécute (…) et lorsque SM le roi donne des instructions directes dans une affaire, le gouvernement considère que SM le roi a fait le nécessaire et qu’il n’y pas lieu d’intervenir de la part du gouvernement ».
Et Benkirane de se demander: « A qui SM le roi a donné ses instructions? …au ministre de l’intérieur et au ministre de la justice qui sont tous deux membres du gouvernement, donc l’affaire est tranchée…(…) », répond-il à sa propre question.
Tout en insistant sur la place qu’occupe le roi Mohammed VI dans « l’esprit et les cœurs des marocains » et la confiance dont il jouit auprès d’eux, le chef du gouvernement a précisé: « le roi au Maroc est le chef de l’Etat, le chef de l’administration, et le chef du gouvernement…et moi je ne suis qu’un simple membre dans son conseil des ministres…peut être qu’il est difficile pour certains à l’étranger de comprendre cela, mais le roi ici dans notre pays, en plus de son statut juridique et sa position religieuses, jouit d’une grande place dans l’esprit et les cœurs de tous et pas seulement dans les lois et les constitutions (…).
Effectivement, il est difficile de comprendre cela, surtout pour les allemands et même pour les marocains d’ailleurs qui ont cru avoir voté pour un chef du gouvernement avec toutes les prérogatives que lui confère la constitution, mais qui se plait à se réduire au rang d' »un simple ministre » au sein du Conseil des ministres, reconnait qu’il n’est le chef de l’administration, ni d’ailleurs le chef du gouvernement. Un chef de gouvernement qui dit ne pas être un chef de gouvernement! ses électeurs apprécieront.
Pour revenir à cet entretien qui risque de déboussoler les citoyens d’Angela Merckel, et à travers eux l’opinion publique internationale, Abdelilah Benkirane, a par ailleurs déploré le fait que certains aient conféré un caractère de régionalisme en brandissant, lors des manifestations, des drapeaux et en scandant des slogans réclamant la sécession de certaines villes du nord du Maroc dont Al Hoceima. Il en est de même des slogans exploités, selon lui, par ses adversaires politiques qui demandaient son départ et qui ont brûlé ses photos durant ces manifestations.