La plate-forme indépendante EU Today retrace, dans un article fouillé, les errements du journaliste remuant Omar Radi, soupçonné de viol, de bénéficier de «financements de l’étranger» en lien avec des « services de renseignement».
«Le journaliste Omar Radi exerce sa profession en toute liberté. Il n’a jamais été interrogé ou importuné, d’une quelconque manière, au sujet de son travail, de ses activités ou des ses opinions publiques. Il n’avait jamais auparavant signalé de violation ou de restriction à cet égard, que ce soit auprès des autorités judiciaires ou des institutions nationales compétentes. Ce n’est que vers la fin de l’année 2019 qu’il a commencé à émettre des allégations selon lesquelles il ferait l’objet d’intimidation, de harcèlement et d’acharnement judiciaire, et ce, à la suite de l’engagement d’actions judicaires à son encontre par le procureur du Roi ou par des particuliers» affirme EU Today. Le média expose les démêlés du journaliste soupçonné par la justice marocaine de bénéficier de «financements de l’étranger» et d’entretenir des «liens avec un officier de liaison d’un pays étranger» qui aurait travaillé «sous couvert diplomatique depuis 1979 dans plusieurs régions de tensions» dans le monde. Omar Radi a été placé en détention, mercredi 29 juillet, pour «viol» et «réception de fonds étrangers dans le but de porter atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat», ont annoncé les autorités. Il a été transféré à la prison d’Oukacha à Casablanca et son procès doit débuter le 22 septembre.
Le parquet a exhorté au juge d’instruction d’enquêter sur des «délits relatifs à l’attentat à la pudeur avec violence et viol», après une «plainte déposée par une citoyenne». A l’heure actuelle, «les trois actions en justice intentées contre lui ne sont aucunement liées à son statut de journaliste, ni à son droit à la liberté d’expression garanti par la Constitution marocaine. D’ailleurs, les autorités marocaines avaient fourni les explications nécessaires pour réfuter les allégations de Radi» énonce le média britannique.
EU Today retrace la descente aux enfers du journaliste, mis en cause aussi, le 6 juillet, pour «ivresse publique et violences» selon le porte-parole de la direction générale de la sûreté nationale (DGSN), et a été placé en garde à vue pendant quelques heures.
Allégations non fondées de harcèlement judiciaire. Première affaire : Le 6 avril 2019, Omar Radi a publié le Tweet suivant : « Lahcen Talfi, juge de la cour d’appel, bourreau de nos frères, souvenons-nous bien de lui. Dans beaucoup de régimes, les petits bras comme lui sont revenus supplier après en prétendant avoir exécuté des ordres. Ni oubli ni pardon avec ces fonctionnaires sans dignité ! « .
«Ces propos, considérés comme outrage à magistrat, sont constitutifs d’une infraction pénale en vertu de l’article 263 du code pénal marocain. A cet effet, il a été convoqué et entendu par le procureur général du roi avant d’être placé en détention préventive, pour la première fois, le 26 décembre 2019. La cour d’appel de Casablanca a ensuite décidé, le 31 décembre 2019, de lui accorder la liberté provisoire suite à une demande formulée par son avocat à cet effet. Ses droits de défense, tels que prévus par la loi, ont été respectés tout au long de cette procédure» détaille US Today.
Il a été condamné, le 17 mars 2020, à quatre mois de prison avec sursis et une amende de 500 dirhams pour outrage à magistrat, une décision qu’il a contestée en appel. L’audience est prévue le 23 septembre 2020.
Seconde affaire : « Le 24 juin 2020, Omar Radi a été convoqué dans le cadre d’une enquête préliminaire menée par la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ), sous la demande du parquet général, concernant la réception de fonds étrangers en lien avec des services de renseignement. Le procureur du Roi près la Cour d’appel de Casablanca a publié un communiqué de presse, en date du 24 juin 2020, indiquant que cette convocation s’inscrit dans le cadre d’une enquête sur l’implication présumée de Radi dans une affaire de financement lié à des services de renseignement étrangers. Le procureur du Roi a noté que l’enquête sur cette affaire est menée sous tutelle du ministère public, dans le respect total des procédures légales» circonstancie le média britannique. Les enquêtes de la BNPJ ont donné lieu à une mise en accusation par le procureur du roi et une procédure judiciaire fut ouverte dans ce sens le 29 juillet 2020.
Troisième affaire : «A la suite à une plainte déposée contre Radi auprès de la Gendarmerie royale (GR) et suite aux résultats de l’enquête menée par la GR à cet égard, le Procureur a renvoyé l’affaire au juge d’instruction de la Cour d’appel de Casablanca afin d’ouvrir une enquête sur les deux accusations, d’attentat à la pudeur et viol avec violence. Le communiqué de presse du procureur général précise, également, que les résultats des enquêtes menées par le BNPJ ont conduit le parquet général à ordonner l’ouverture d’une enquête concernant l’implication de Omar Radi dans une affaire de réception de financement étranger, d’atteinte à la sécurité intérieure de du pays et de collaboration avec des agents étrangers dans le but de nuire à la situation diplomatique du Maroc et ce, en vertu des articles 191 et 206 du code pénal marocain» établit EU Today.
Le juge d’instruction a décidé de le placer en détention préventive dans l’attente des conclusions des enquêtes.
«Le Maroc a œuvré ardemment pour consolider l’indépendance institutionnelle de son pouvoir judiciaire et assurer l’efficacité et le bon fonctionnement de sa justice, notamment en renforçant le cadre législatif de son système judiciaire, en vertu des exigences constitutionnelles en la matière» explicite le média, qui indique que le Royaume «se conforme aux dispositions de la protection des droits et libertés des individus et des groupes et de leur sécurité judiciaire et respecte les garanties d’un procès équitable.»
A cet égard, «le Maroc a adopté plusieurs lois consolidant l’indépendance de la justice, dont la loi organique n° 100.13 relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, et la loi n° 33.17 du 18 septembre 2017 sur le transfert des compétences de l’autorité gouvernementale chargée de la justice au procureur du roi près la cour de cassation en sa qualité de chef du parquet» rappelle le média. «En vertu de cette loi, le procureur général du Roi près la Cour de cassation, en sa qualité de chef du parquet général, a remplacé le ministre de la Justice dans le cadre de tous les pouvoirs en vertu desquels ce dernier exerçait un pouvoir d’autorité, de contrôle ou de supervision sur les magistrats» a-t-il ajouté.
«Le traitement judiciaire des affaires impliquant Omar Radi est effectué conformément à la loi et dans le strict respect des principes de la présomption d’innocence et de la confidentialité de l’enquête. Ce traitement lui offre toutes les garanties prévues par la loi. Pour les affaires de droit commun impliquant Omar Radi, il appartient à la justice marocaine d’accomplir sa noble mission en garantissant les droits de chaque individu, loin de toute influence ou confusion» a souligné EU Today.
«Avant sa mise en détention préventive, Omar Radi continuait à exprimer librement ses opinions, y compris celles portant préjudice à diverses parties, dont le gouvernement. Omar Radi est le seul à avoir divulgué des éléments de l’enquête, dans une tentative évidente de défendre la version fallacieuse du « harcèlement judiciaire » présumé contre lui. Concernant les allégations selon lesquelles les poursuites engagées contre Omar Radi seraient motivées par ses opinions critiques à l’égard du gouvernement. En ce qui concerne les allégations relatives au dénigrement de Radi par certains médias nationaux, il convient de noter qu’il s’agit de propos non fondés dans la mesure où les publications desdits médias ne sont pas soumises à un contrôle préalable. Le contenu des articles publiés sur cette affaire relève de leur responsabilité, et toute personne qui s’estime lésée par ce contenu, dispose des moyens nécessaires pour faire valoir ses droits» conclut le média britannique.