En prétendant d’être guidé par le souci de lui rendre justice, le site d’actualités Médiapart, dont le crédit ne cesse de s’étioler, a tenté d’instrumentaliser la parole de Hafsa Boutahar, qui accuse Omar Radi de viol, pour blanchir ce dernier.
Drôle de procédés. Début 2019, le site d’actualités français Mediapart a été condamné pour diffamation pour un article au vitriol contre une personnalité française. Le juge avait critiqué le sérieux de son enquête, estimant que l’article était «plutôt inopportun». Le tribunal a relévé notamment «le caractère incomplet de l’enquête» qu’il a considérée «à charge» et «non contradictoire». Le tribunal a estimé que les deux impliqués dans cette affaire [Fanny Pigeaud et Edwy Plenel, NDLR] s’étaient montrés par conséquent «de mauvaise foi».
Belote et rebelote. Malgré de fréquentes dérives et la suspicion croissante des lecteurs, les problèmes déontologiques continuent. Hafsa Boutahar a dénoncé le traitement de l’affaire de Omar Radi dans une douloureuse sortie sur Twitter. L’enquête publiée par le site d’investigation, qui se borne à flétrir Mme Boutahar en termes corrosifs, a été diffusée 24 heures avant le début du procès de Omar Radi. Nulle juxtaposition d’affirmations contradictoires, mais un texte qui relate par le menu le moindre détail en faveur du journaliste en détention et qui vise à ternir l’honneur d’une personne qui affirme avoir subi un viol. Hafsa Boutahar, assaillie, opprimée, intimidée a été contactée par Médiapart à des fins fallacieuses.
Celle qui est présentée dans le papier co-écrit avec le journal l’Humanité comme «une jeune femme, employée en freelance, pour des missions commerciales et administratives au Desk» a dénoncé «des pratiques non-éthiques et non-professionnelles» de la part de Médiapart, qui affirme que «la plaignante [a] refusé [ses] demandes d’entretien au nom du secret de l’instruction». L’enquête a été critiquée sur les réseaux sociaux pour sa dynamique qui invite au spectaculaire — voire à la mise en scène —, en faisant le tri des détails relatifs à l’affaire Radi.
Hafsa Boutahar n’en revient pas. Sur Twitter, elle rétablit la vérité : «Médiapart a essayé de me tromper et a mené des pratiques non-éthiques et non-professionnelles, essayant de me faire croire qu’ils soutiendraient dans mon cas et qu’ils soutiendraient les victimes de viol, juste pour que je réponde à leurs questions. Dans leur article, cependant, ils ont montré l’étendue de leur exploitation des victimes de viol, dans des affaires politiques cachées. Imaginez si mon prénom était Jacqueline. Les institutions françaises me traiteront-elles de la même manière ?» Et de continuer : «Ce sont des pratiques racistes dangereuses à mon encontre, en tant que Marocaine.»
L’enquête, pourtant, rappelle que Hafsa Boutahar a «décidé de ne parler qu’une seule fois pour que les gens sachent la vérité». Si Hafsa Boutahar s’est exprimée, quatre jours après le dépôt de la plainte contre Omar Radi, c’est parce que ce dernier s’est livré, selon elle, à «des mensonges dégoûtants». «Je ne peux pas rester les bras croisés et le laisser dire ce qu’il veut pour me salir. Mon avocat considère que c’est une violation grave du secret de l’instruction», s’est indignée la plaignante dans une déclaration à un site électronique.
«S’il n’était pas allé parler de moi dans les bars en riant de ce qu’il m’avait fait subir, peut-être que je me serais tue comme la plupart des personnes qui se font violer, explique-t-elle à la même source. Vous croyez vraiment que c’est facile de s’adresser à la justice pour ce genre de chose dans une société comme la nôtre ? Que c’est facile de prendre le risque qu’on vous réponde que vous l’avez peut-être bien cherché ? Qu’on se demande ce que vous faisiez là ? Je me suis posé mille fois la question : allait-on m’aider ? Omar Radi est très connu et a de nombreux soutiens et moi, je n’ai rien.»
Les auteurs de l’obscur manifeste qui a appelé notamment le Conseil national de la presse à prendre des «sanctions disciplinaires» contre ceux qui violent le code de déontologie se prononceront-ils sur ce scandale retentissant ? Au final, les deux journalistes auteurs de l’enquête ont recueilli des bruits, de vulgaires détails, des témoignages à demi sérieux. De ce laborieux et artificieux tissu de diffamations, de mensonges, d’outrages, auquel ont travaillé les deux journaux, il n’est rien resté.
La faiblesse du papier publié par Médiapart est d’avoir été le plus souvent à côté des bonnes questions ou de ne les voir qu’avec des passions, avec des préjugés, avec des «états d’esprit.» Les deux journalistes qui ont commis ce texte ont des impressions, des velléités plutôt que le sens des grandes réalités ou une mesure exacte des choses. Ce qu’on appelle éthique chez Médiapart n’est qu’un mot décevant et trompeur. À quel titre aurait-il pu se considérer comme un tribunal remplissant un rôle judiciaire ? Une question qui restera peut-être sans réponse.