La 116e marche des étudiants prévue mardi à Alger a été interdite pour la troisième semaine consécutive par les autorités, qui ont procédé à de nombreuses arrestations dont plusieurs journalistes brièvement placés en détention.
Les forces de l’ordre algériennes ont réprimé les actions de protestation devant être organisées, le 11 mai 2021, à l’occasion du 116e mardi du Hirak des étudiants dans les wilayas d’Alger, Bejaïa, Constantine et Sétif, la police a procédé a des dizaines d’arrestations parmi les manifestants et les journalistes présents pour couvrir les marches des étudiants.
Selon le Comité national pour la libération des détenus, cinq journalistes ont été interpellés à Alger centre ou ils devaient assurer la couverture de ce 116e mardi. il s’agit du photojournaliste Samir Kharoum (quotidien El Watan), du journaliste Khaled Drareni (Casbah Tribune), Feriel Bouaziz (Interlignes), Hakim Hammiche (Tariq News) et Mustapha Bastami (El Khabar). La même source précise que selon des témoins oculaires, la police a vérifié les ordres de mission et leurs cartes de presse avant de les interpeller.
Tous ont été relâchés en fin d’après-midi «mais sans recevoir d’explication sur ce qui les a conduits à passer 5 heures au commissariat, sans être interrogés, et à avoir leur carte d’identité et leur téléphone confisqués», a précisé à l’AFP Souhaieb Khayati, directeur du bureau Afrique du Nord de RSF.
Ces journalistes ont été libérés au bout de cinq heures passées au commissariat place des martyrs. Toutefois, la communauté universitaire, soutenue par les citoyens a réussi à tenir leur marche aujourd’hui à Tizi Ouzou, en partant du campus Hasnaoua vers le siège de l’ancienne mairie, tout en scandant des slogans hostiles au pouvoir et exigeant la libération immédiate et sans conditions de tous les détenus du Hirak, dont les portraits ont été brandis par les centaines de manifestants ayant pris part a cette marche.
«Aujourd’hui, la dérive se poursuit, le ministère de l’Intérieur décide de mettre à exécution sa décision autoritaire, il interdit les marches et procède à plusieurs arrestations», a indiqué Saïd Salhi, vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’homme, soulignant que la marche des étudiants avait été «interdite et réprimée».
Il a aussi déploré «des interpellations d’étudiants, de militants, de journalistes et de photographes». Pour la branche de RSF en Afrique du Nord, «la répression s’intensifie».
L’ONU préoccupée
A l’approche des élections législatives anticipées du 12 juin, rejetées par le Hirak, la répression ne cesse de s’accroître en Algérie, estiment les organisations de défense des droits humains.
L’ONU est «de plus en plus préoccupée» par la situation en Algérie où des droits fondamentaux, comme les droits à la liberté d’opinion et de réunion pacifique, «continuent d’être attaqués», a indiqué mardi le Haut-Commissariat aux droits de l’homme à Genève.
«Nous demandons instamment aux autorités algériennes de cesser de recourir à la violence pour disperser les manifestations pacifiques et de mettre fin aux arrestations arbitraires et aux détention de personnes ayant exercé leurs droits à la liberté d’opinion, d’expression et de réunion pacifique», a indiqué Rupert Colville, un porte-parole du Haut-Commissariat.
Certains manifestants arrêtés les semaines précédentes avaient été relâchés après avoir été contraints de signer un document au commissariat dans lequel ils s’engageaient à ne plus participer aux marches hebdomadaires, sous peine d’être incarcérés pour récidive, selon M. Salhi.
Le ministère de l’Intérieur a rappelé dimanche que les marches hebdomadaires du Hirak, mouvement de contestation algérien, devaient faire l’objet d’une «déclaration» préalable.
Les manifestants avaient changé leur parcours vendredi pour éviter les nombreux cordons de sécurité et véhicules de police barrant l’accès aux lieux de rassemblements habituels.
Selon le Comité national de libération des détenus, plus de 70 personnes sont actuellement incarcérées pour des faits en lien avec le Hirak et/ou les libertés individuelles.