Depuis le commencement du mouvement de contestation populaire en Algérie, les dessinateurs de presse soutiennent le « Hirak » en publiant leurs images satiriques sur les réseaux sociaux. Mais après la condamnation de l’un des leurs et l’élection d’Abdelmadjid Tebboune à la présidence, ils appréhendent un coup de vis de la répression.
Abdelmadjid Tebboune est l’élu. L’homme politique agé de 74 ans est entouré de ses concurrents à la présidence algérienne, le chef d’état-major de l’armée, Ahmed Gaïd Salah, lui enfile une pantoufle de vair. Tout cela sous le regard bienveillant d’un Abdelaziz Bouteflika statufié. Une scène inspirée de Cendrillon a été imaginée par le dessinateur Abdelhamid Amine alias Nime début novembre, soit quelques semaines avant la présidentielle qui a propulsé Abdelmadjid Tebboune à la présidence du pays, dès le premier tour du scrutin le 12 décembre.
Le dessinateur Abdelhamid Amine, à l’imagination débordante, a été emprisonné et condamné le 11 décembre à une peine d’un an d’emprisonnement, dont trois mois fermes. D’aprés le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), le parquet d’Oran avait requis 18 mois de prison ferme contre lui pour atteinte au moral de l’armée et à l’intégrité du territoire, pour ses derniers dessins publiés sur Instagram.
Selon le CNLD, plus de 140 manifestants, militants, artistes ou journalistes ont été arrêtés depuis le mois de juin. Le durcissement de la répression à l’égard du « Hirak », ce mouvement de contestation populaire qui a conduit à la démission d’Abdelaziz Bouteflika en avril dernier, est acté.
Des youtubers ont également été arrêtés pour une photo postée sur les réseaux sociaux. Il convient de souligner que le genre de la satire est bien ancré en Algérie : aux noms des célèbres Ali Dilem ou Slim et le Hic, s’ajoutent maintenant ceux de Nime, Karim Bouguemra ou encore l’Andalou. Ce jeune dessinateur sorti des Beaux-Arts d’Alger a notamment partagé sur Instagram sa «valse» des candidats, dansant comme des pantins.
« Le dessin de presse est ce qui nous constitue. Nous continuerons à nous exprimer et à exploiter tous les interstices de liberté qu’il nous reste », conclut Karim Bouguemra.