Chute vertigineuse des prix du pétrole, mais aussi rare résistance tribale : le projet de mégalopole futuriste Neom, pilier du plan économique du prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane, voit se dresser devant lui une série de difficultés.
Neom, le projet de 500 milliards de dollars, consiste à créer de toutes pièces une mégalopole le long de la côte de la mer Rouge, dans le nord-ouest de l’Arabie saoudite. Il se veut comme un ensemble urbain futuriste qui évoque une superproduction de science-fiction avec ses taxis volants et ses robots intelligents. Toutefois, ce projet reste confronté à une résistance parmi la population locale, dans un pays qui a la réputation de ne pas tolérer de dissonances.
Pour ses opposants, Neom est conçu comme une enclave pour expatriés aux moeurs libérales, et il ne profitera probablement pas aux habitants. Les responsables de Neom ont indiqué que 20.000 personnes au total devaient être relogées afin de permettre l’érection de cette ville futuriste, dont les premières constructions ont vocation à être achevées avant 2023. Pour ces habitants déplacés, le gouvernement, en plus de « nouvelles propriétés », prévoit « une généreuse compensation en espèces », affirme à l’AFP une source saoudienne associée au projet.
Des « programmes de responsabilité sociale » offrant bourses universitaires et formations professionnelles ont aussi été lancés par les instigateurs de Neom, selon elle. Mais si les médias officiels ont publié un serment de loyauté de la tribu envers les dirigeants saoudiens, plusieurs de ses membres ont rejeté les compensations, ont affirmé à l’AFP des militants. Comparant la démarche à celle de l’expropriation en droit occidental, la même source saoudienne a souligné que la saisie de terrains survenait « en tout temps, partout dans le monde, quand des routes, des voies ferrées ou des barrages sont construits ».
Reste que pour Neom, ce dossier tribal épineux vient aggraver les complications financières, dans un pays toujours ultradépendant au pétrole et qui fait face à la chute des prix du brut sur fond de pandémie mondiale de Covid-19. Le gouvernement prépare des coupes budgétaires « douloureuses », a récemment indiqué le ministre des Finances Mohammed al-Jadaane, sans préciser si Neom, annoncé en 2017, serait concerné.
Déterminé à transformer le royaume, le prince Mohammed, appelé MBS, semble toutefois prêt à aller de l’avant avec Neom, présenté comme une Silicon Valley régionale. « Les fondamentaux économiques se sont retournés contre ce projet fantastique, mais je ne m’attends pas à ce que MBS y renonce », dit Kristin Diwan, de l’Arab Gulf States Institute à Washington. « C’est la pierre angulaire de tout ce qu’il veut réaliser. »






