La direction du Festival international de Byblos a annoncé le mardi l’annulation du concert du groupe libanais Mashrou’Leila. Le groupe qui devait se produire sur la scène le 9 août se retrouve sidéré devant cette décision.
La controverse autour du groupe et ses œuvres musicales date d’un moment déjà. Mashrou’ Leila aurait provoqué la colère du clergé maronite et des deux principaux partis politiques du pays. Lynchés, critiqués et accusés d’avoir porté atteinte à la sacralité des symboles chrétiens et d’encourager à l’homosexualité, le groupe ne pourra pas jouer ses morceaux engagés.
Les organisateurs du festival ont exprimé dans un communiqué publié sur leur page Facebook que c’est avec colère et tristesse qu’ils ont pris la décision d’annuler le prochain spectacle de Mashrou’Leila. «C’est en accord avec le groupe que nous avons été contraints de déprogrammer le spectacle afin de préserver la sécurité et d’éviter une effusion de sang, la sécurité des artistes et les spectateurs doivent rester notre priorité numéro un» expliquent les organisateurs.
L’origine de cette polémique est un post publié sur Facebook par le leader du groupe, Hamed Sinno, illustré par un montage de photo où le visage de la Vierge Marie a été remplacé par celui de la star américaine Madonna. Mais aussi deux chansons, Idols et Djin, qui portent atteinte, selon des membres du clergé catholique maronite, aux «valeurs religieuses et humaines».
Suite à la contestation de l’église, et du parti du Courant patriotique libre auquel appartient le président libanais Michel Aoun, plusieurs internautes ont suivi la foule, et ont appelé ces derniers jours à « mourir en martyr » et affronter « les adorateurs de Satan » en faisant référence aux membres du groupe.
Réagissant à l’annulation du concert, Mashrou’Leila a publié un communiqué à travers lequel il s’est défendu de porter préjudices aux croyances religieuses et a qualifié la campagne qui l’a visée d’oppressante et diffamatoire. « L’expérience que nous avons vécue nous a convaincue de la fragilité de la situation au Liban » affirme le groupe.
Dans le même contexte, des ONG telles que Amnesty International ont dénoncé la campagne qu’a subie le groupe, «Il est inadmissible que de tels appels continuent d’émaner d’institutions censées servir de modèles pour leur public, qui peuvent et doivent défendre le droit à la liberté d’expression et la protection des catégories de population vulnérables, au lieu de permettre les propos haineux, notamment homophobes» a manifesté Lynn Maalouf, directrice des recherches pour le Moyen-Orient à Amnesty International.
Le groupe de rock, qui détonne dans le paysage arabe, dérange et suscite une intolérance qui n’a pas lieu d’être dans un rassemblement de musique. En effet, le groupe a déjà vu ses concerts annulés dans d’autres pays de la région, en Jordanie et au Caire en 2016 et en 2017, à la suite notamment de protestations de parlementaires conservateurs.
Pour rappel, le groupe libanais a fait salle comble le 23 juin pendant son spectacle sur la scène du Théâtre National Mohammed V à Rabat dans le cadre du festival Mawazine.