Mountaga Diop, juriste et spécialiste du droit des enfants, a lancé au Maroc une expérience inédite. Ce Franco-Sénégalais est actuellement éducateur PJJ au ministère de la justice en France, militant et sensible aux problèmes des réfugiés. Il est également président-fondateur de l’association interculturelle Kirikou. Entretien.
En 2015, Mountaga Diop décide de créer l’association Kirikou, qui œuvre pour la protection et l’accompagnement des mineurs afin qu’ils bénéficient de leurs droits, à laquelle est adossée une garderie dédiée à des enfants (de 18 mois à 5 ans) issus de mères isolées migrantes.
Barlamane.com : Qui est Mountaga Diop ?
Je suis juriste et spécialiste du droit des enfants, diplômé de l’université Paris VIII en France en Droit et Stratégies de l’action humanitaire. J’ai travaillé en tant que Coordinateur national de résilience scolaire au sein du croissant Rouge marocain. Cette institution est dirigée par Lalla Malika. Quand elle est décédée, j’ai décidé de retourner en France et de faire des allers-retours vers le Maroc. Actuellement, je suis à Paris et je travaille au ministère de la justice depuis quatre mois.
Aussi, je suis fondateur président de la crèche interculturelle Kirikou au Maroc qui accueille gratuitement des enfants marocains et étrangers dans un contexte du vivre ensemble.
D’où l’idée vous êtes elle venue ? Comment avez-vous eu cette sensibilité à ce sujet ?
Après mes études à Paris VIII, je suis rentré au Maroc pour un stage et le sujet de mon mémoire portait sur les mineurs migrants, réfugiés au Maroc. Un départ d’immersion sur le terrain, la rencontre de la société civile, des organisations non-gouvernementales m’ont permis de commencer à toucher un peu du doigt la vulnérabilité de ces familles qui sont souvent dans la rue avec des enfants s’adonner à la mendicité. Ainsi, je voyais l’accès très difficile pour certaines familles d’inscrire leurs enfants dans les crèches vu qu’au Maroc le système de crèche est privé.
J’ai commencé alors par créer l’Association en 2015 qui a coïncidé avec la SNIA (Stratégie nationale d’immigration et d’asile) portée par le roi Mohammed VI. Les autorités nous ont facilité la tâche, on a eu des subventions au niveau du Ministère de Migration à l’époque, la Coopération Espagnole nous avait financé. Nous avions des projets pour former les femmes, des filières qui leur permettaient d’avoir l’accès à l’emploi puisque la majorité de celles-ci étaient régularisées par le souverain. De 2015 à 2019, on subventionnait les crèches privées pour mettre les enfants migrants dans les crèches des quartiers de Rabat comme El Youssoufia, Takadoum, G5 où sont concentrées ces familles.
Recevez-vous des enfants marocains ?
La crèche est mixte. Actuellement la crèche interculturelle Kirikou se compose de 21 à 24 enfants et la première moitié sont des enfants marocains et l’autre subsahariens.
Comment financez-vous ce projet ?
Par exemple, pour l’année 2020-2021, on a été financé par l’Ambassade de France à Rabat, pour une année scolaire. Et les autres années, ce sont des subventions, des donations par des gens qui font des virements qui nous permettent de payer le loyer et les salariés. On vit au jour le jour !
C’est le même concept pour celle du Sénégal mais avec les élus locaux. Les financements sont décidés par les élus, les maires et les conseils municipaux.
Qu’en est-il pour Casablanca ou les autres villes marocaines ? Avez-vous pensé à créer d’autres établissements comme celui de Rabat ?
La crèche Kirikou existe sur Paris depuis 2020, une antenne au Sénégal depuis 2018 et à Rabat depuis 2019. Au courant de 2022, on pense installer une crèche à Oujda et Marrakech. Et en 2023 on aimerait bien élargir et faire des ouvertures sur Casablanca et Tanger. À Casablanca on avait ouvert en 2019 juste avant le Covid-19 et nous avions dû fermer pour raisons économiques.
Avez-vous déjà été sollicité pour participer à des évènements caritatifs ?
Il y a l’association Lagon Dakhla, dirigée par Laila Ouachi. Les responsables nous avaient accordés des fonds qui nous ont beaucoup aidés d’ailleurs en 2020 pour lancer la crèche à Rabat.