«Face à la pandémie, l’État [marocain] a su agir de manière rapide et innovante» affirme Jeune Afrique. Si ce phénomène imprévu s’est coïncidé avec la crise économique, le royaume a placé volontiers la lutte sur les questions sanitaires, mettant celles de finance et d’industrie entre parenthèses.
L’invisible ennemi qui décime les gens avec sa muette artillerie a été apprivoisé au Maroc. Ou presque. Dans son édition d’août 2020, l’hebdomadaire panafricain édité à Paris Jeune Afrique revient sur la pandémie de maladie à coronavirus qui s’est déclarée au royaume le 2 mars. D’abord, une confidence d’un cadre de l’exécutif : «Le pays est sorti du lockdown avec de nombreux acquis. En matière de santé, dans le processus d’identification des personnes vulnérables, sur le plan industriel ou dans les domaines de la digitalisation et du paiement électronique, cette crise sanitaire a été un véritable accélérateur. Des choses que l’on disait impossibles à réaliser se sont révélées faisables.» Au lieu d’attendre que le fléau s’en aille promener ailleurs ses ravages, le Maroc a réagi, l’arme au bras, poursuivant ses engagements contre le Covid-19.
Cette guerre sanitaire n’est point certainement une guerre ordinaire. Le royaume a élevé des forteresses formidables, pris des décisions courageuses. «Cette stratégie énergique et proactive a été rendue possible grâce à la prise en main directe par le Palais de la gestion de crise. Dès les premiers jours, le roi donne le ton en multipliant les réunions au sommet. Une sorte de task-force est constituée pour gérer en premier lieu les questions sécuritaires et sanitaires. Les instructions sont données pour que tous les départements, administrations et services du royaume soient mobilisés, afin de se montrer inventifs et efficaces dans ce contexte inédit. L’implication personnelle de Mohammed VI s’est aussi traduite par l’instauration rapide d’un mécanisme de solidarité, le Fonds spécial pour la gestion de la pandémie de Covid-19, qui se révélera crucial pour la mise à niveau du dispositif sanitaire, ainsi que pour l’atténuation des conséquences socio-économiques. Le souverain y a lui-même contribué à travers le holding familial Al Mada, avec un don de 2 milliards de dirhams (plus de 180 millions d’euros). Tous les grands groupes et les grosses fortunes du royaume ont immédiatement rivalisé de générosité pour suivre l’exemple royal, permettant d’alimenter le fonds anticrise de quelque 35 milliards de dirhams, soit près de 3 % du PIB du pays» détaille Jeune Afrique.

Le fléau semble abandonner certaines villes qu’il a douloureusement éprouvées. Cette crise sanitaire les émotions qu’elle a inspirées ont fait naître des questions de toute sorte. La marche de la maladie a permis au Maroc de se protéger par des précautions sanitaires efficaces. Il n’y a plus à disserter sur le caractère contagieux du Covid-19. Le système le plus prudent l’a emporté dans l’esprit des autorités publiques, qui sont allées trop loin dans la réaction. Il est certain qu’il est des cas où, pour défendre l’intégrité de la santé publique, il ne faut point hésiter à prendre à temps des mesures vigoureuses, et le Maroc a été salué pour sa prévenance.
«Le chef de l’État a par ailleurs pris ses responsabilités en tant que commandeur des croyants en décidant de fermer tous les lieux de culte, après consultation du Conseil des oulémas, dès la déclaration de l’état d’urgence sanitaire, le vendredi 20 mars. Une première dans le royaume. La dynamique impulsée par le souverain a entraîné dans son sillage l’ensemble des composantes institutionnelles. Même la grande muette s’est révélée plus ouverte que jamais : ses discrets galonnés sont devenus plus médiatisés, et les médecins militaires sont venus en renfort auprès de leurs confrères dans les hôpitaux publics. Du côté du cabinet exécutif, la cadence des Conseils de gouvernement s’est accrue, et l’appareil législatif s’est montré plus prolifique que jamais. En cette période d’état d’urgence sanitaire (prorogé jusqu’au 10 juillet), Saadeddine El Othmani a réuni deux à trois Conseils de gouvernement par semaine au lieu d’un seul habituellement. Entre le 12 mars et le 24 avril, pas moins de dix Conseils de gouvernement se sont ainsi tenus par visioconférence. Cette organisation a permis d’adopter très rapidement des décrets-lois importants, comme celui portant création du Fonds spécial pour la gestion de la pandémie de Covid-19 ou celui relatif aux modalités d’exécution des dépenses du ministère de la Santé. Il n’y avait plus de temps pour des débats, parfois stériles, en commission ou en sous-commission. Il fallait élaborer des décrets-lois, les adopter et les mettre en œuvre quasiment le jour même. Avec son architecture institutionnelle particulière, le royaume est parvenu à allier rapidité dans la prise de décision et respect des règles constitutionnelles» souligne Jeune Afrique.
Quelque 4,3 millions de familles travaillant dans le secteur informel ou tirant leur substance de métiers précaires ont bénéficié d’aides financières directes pour juguler les effets de la crise sanitaire. Environ 1,8 million de foyers ont été concernés par ce soutien fourni par le fond spécial d’urgence «Covid-19» créé sous les instructions du roi Mohammed VI. Les aides allouées étaient de 800 à 1.200 dirhams par mois selon la taille du foyer. A cette initiative s’ajoutent une suspension de paiement des factures d’eau et d’électricité et des reports de crédit à la consommation. Des distributions alimentaires ont été distribuées pour les plus démunis.
Le secteur informel représente près de 80% des emplois au Maroc, selon un rapport de l’Organisation internationale du travail (OIT), et les trois quarts des travailleurs ne disposent d’aucune couverture sociale d’après les statistiques officielles. Près de 143.000 entreprises (soit 57% des sociétés recensées) ont discontinué leurs activités, la moitié de celles qui travaillent encore ont réduit leur production et quelque 800.000 salariés et employés se sont retrouvés sans gagne-pain. Jeune Afrique précise que «des avancées considérables ont été réalisées en matière d’identification et de ciblage des populations les plus modestes. En plus des salariés inscrits à la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) par des entreprises qui se sont retrouvées en difficulté, les autorités ont pu débloquer des aides pour soutenir les ménages démunis bénéficiant déjà du régime d’assistance médicale (Ramed) et, surtout, les travailleurs du secteur informel qui ne figuraient jusqu’alors sur aucun registre. Un véritable prélude à la constitution du Registre social unifié (RSU), censé optimiser les différentes aides sociales distribuées par l’État à travers de nombreux programmes. D’ailleurs, pour faire avancer ce chantier royal dès la sortie du confinement, le gouvernement s’est empressé de présenter à la Chambre des représentants le projet de loi 72.18 relatif au système de ciblage des bénéficiaires des programmes d’appui social.»
Le Maroc a tracé à la population ses devoirs durant la crise sanitaire avec toute l’assurance d’une nation qui ne connaît point le doute. La direction des établissements et des mesures sanitaires était exemplaire. Les adversaires-nés des quarantaines, parce qu’ils y voient un obstacle aux mouvements et aux intérêts commerciaux, avaient tort. Il n’y a pas de responsable, quel que soit le titre de son portefeuille, qui ait pu mettre un intérêt commercial quelconque en balance avec l’intérêt ultime de la conservation de la santé générale. L’intérêt commercial n’est-il pas d’ailleurs irrémédiablement atteint à l’instant même où la santé générale est compromise ? s’est-on interrogé. Le Covid-19 a trouvé dans le royaume une sérieuse, vigilante, énergique intendance sanitaire bien résolue à refuser la libre pratique à cet hôte épouvantable.
«Le plus important, c’est de maintenir la cadence et de capitaliser rapidement sur les acquis de cette crise », souligne un membre du cabinet exécutif relayé par Jeune Afrique. Et de conclure : «Célérité et efficacité, tel devrait être le mantra du nouveau modèle de développement. Pandémie de Covid-19 oblige, la commission nommée par Mohammed VI en décembre 2019 pour travailler à son élaboration ne rendra finalement son rapport qu’en janvier 2021.»






