Dans un briefing spécial du département d’État US au sujet du rapport 2022 sur la liberté religieuse dans le monde publié un peu plus tôt dans la journée, un haut fonctionnaire a spécifié que le rapport est soumis au Congrès et que le secrétaire d’État désignera d’ici à la fin de l’année les pays particulièrement préoccupants et les pays figurant sur la liste de surveillance spéciale.
Concernant les libertés religieuses , et bien que les préoccupations demeurent, il a relevé des points positifs dans la protection des minorités religieuses de manière générale en citant l’une des initiatives phares : la progression continue de la déclaration de Marrakech, publiée en 2016 lorsque plus de 300 dirigeants de la région se sont réunis pour définir un ensemble de protocoles et de normes sur la protection des minorités religieuses. Il a appuyé le fait que : « des initiatives telles que la déclaration de Marrakech nous donnent de l’espoir. Bien entendu, la situation dans laquelle nous nous trouvons n’a pas été atteinte du jour au lendemain. Il faudra donc des efforts concertés et des efforts au niveau local pour que des initiatives telles que la déclaration de Marrakech et d’autres initiatives dans la région, qui n’en sont qu’à leurs débuts, puissent prendre de l’ampleur et, en fin de compte, avoir un impact, et faire en sorte qu’elles puissent atteindre leur potentiel en aidant à protéger la liberté de religion des personnes dans toute la région ».
En Afrique du Nord, et plus spécialement le Maroc, après un état des lieux exhaustif et après avoir énuméré les différentes rencontres entre les officiels américains et marocains, le rapport met en exergue « le degré d’acceptation religieuse dans le pays ».
Quant à l’Algérie, le rapport rappelle les préoccupations des officiels américains relatives à la liberté de religion, préconisant notamment l’enregistrement des communautés religieuses minoritaires, la réouverture des institutions religieuses fermées et la libération des personnes emprisonnées sur la base d’accusations liées à la pratique de leur foi. Il se conclut sur le rappel de la désignation de l’Algérie sur sa liste de surveillance spéciale en novembre 2023. Tout porte à croire que le Département d’Etat l’y maintiendra encore. En effet, le premier mai courant, le rapport 2023 de la Commission américaine sur la liberté religieuse dans le monde (URSCIF, United States Commission on International Religious Freedom) a montré que les conditions de la liberté religieuse en Algérie demeurent mauvaises depuis 2017 (persécutant et réprimant les minorités non religieuses et religieuses dont les chrétiens, les Ahmadis) et que les geôles regorgent de prisonniers politiques faussement condamnés pour blasphème. De ce fait l’USCIRF avait dans son rapport recommandé au Département d’Etat de continuer à maintenir l’Algérie sur sa liste de surveillance spéciale en raison de graves violations de la liberté religieuse.
Concernant la Tunisie, le rapport relève que les Baha’is (objets d’une fetwa depuis 2016 toujours pas annulée) et Chrétiens (harcelés, voire même appréhendés par la police pour exposition d’objets liés à leur foi) sont sujets à fortes pressions.
Côté officiels US, leurs préoccupations portent sur les efforts du gouvernement pour contrôler les activités dans les mosquées, sur les difficultés rencontrées par les bahá’ís, les juifs et les chrétiens, et sur les rapports faisant état de discriminations et/ou de violences à l’encontre des minorités religieuses.
Quant à l’Egypte, les préoccupations soulevées concernent principalement l’absence de reconnaissance juridique des minorités religieuses, l’accès aux archives communales juives pour les résidents juifs du pays et la diaspora juive, et l’utilisation de désignations religieuses sur les cartes d’identité nationales, ce qui, selon les minorités, permettait la discrimination religieuse, la discrimination à l’emploi fondée sur la religion et le harcèlement signalé des convertis.
Il est également fait mention de la poursuite d’attaques sporadiques des groupes terroristes, dont l’ISIS-SP, contre des cibles gouvernementales, civiles (apparemment en raison de leur identité religieuse, dont les coptes) et sécuritaires dans le gouvernorat du Nord-Sinaï.
L’Algérie demeure le point noir de la région. Même la Libye qui fait face a une fragilité politique et sécuritaire depuis une décennie ne soulève pas autant de préoccupations selon le rapport 2022 sur les libertés religieuses dans le monde. L’Algérie reste le seul pays de la région à figurer sur la liste de surveillance spéciale au vu du recul des libertés religieuses et des libertés politiques sous couvert d’interdits religieux. Et elle semble partie pour y figurer une année de plus.
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