«La pandémie Covid-19 a brusquement interrompu plus de deux décennies de progrès socio-économique soutenus au Maroc» affirme la Banque mondiale dans une note dévoilée le 4 janvier.
«En 2020, le [Maroc] subira sa première récession depuis le milieu des années 1990, et la contraction économique enregistrée au deuxième trimestre (coïncidant largement avec le confinement) est la plus importante jamais enregistrée. C’est le résultat de la combinaison de l’offre, de la demande et des chocs externes provoqués par la pandémie, mais aussi des effets des conditions météorologiques défavorables sur la production agricole. La crise a un impact sévère sur les emplois et les revenus des ménages, générant un pic de chômage et une détérioration des indicateurs de pauvreté et de vulnérabilité» écrit la Banque mondiale
L’économie marocaine devrait se contracter de 6,3 % et non de 5,2 %, comme l’avait annoncé la banque centrale marocaine. «Bien que l’économie marocaine montre quelques signes de reprise, la situation reste fragile étant donné que les tendances épidémiologiques sont pires aujourd’hui qu’elles ne l’étaient lors de la première vague de contagions. Bien que l’économie se contracte toujours, les derniers mois ont vu une reprise partielle des indicateurs de mobilité, et certaines exportations ont repris leur expansion pré-pandémique» indique l’institution économique internationale.
«Cependant, après une première vague relativement modérée, le nombre de contagions a commencé à augmenter à la suite de l’emprisonnement, et le Maroc a maintenant du mal à aplatir la courbe et réduire la pression de la Covid-19 sur son système de santé. Dans ce contexte incertain, nous prévoyons une contraction du PIB réel de 6,3% en 2020 et un retour à son niveau d’avant la pandémie seulement en 2022» a-t-on affirmé, ajoutant que «comme dans une grande partie du monde, la crise actuelle entraînera une augmentation considérable de l’endettement. Les recettes fiscales se sont effondrées et les dépenses publiques ont été cruciales pour faire face à l’urgence sanitaire et soutenir les revenus des ménages. Cela a naturellement mis fin aux efforts d’assainissement budgétaire des dernières années, et nous prévoyons maintenant que le déficit public augmentera à 7,8% du PIB en 2020 et la dette publique à 76% du PIB. Le déficit du compte courant devrait également augmenter pour atteindre 6% du PIB cette année.»
Malgré la gravité de la crise, a-t-on continué, «le Maroc est mieux placé que les autres économies émergentes pour résister à cette tempête grâce à la crédibilité de son cadre macro-budgétaire, à ses coussins extérieurs relativement importants et à son bon accès aux marchés financiers internationaux».
Pour 2021, la banque espère voir le PIB rebondir et prévoit une croissance de 4,7 %, contre 4,2 % en juin 2020. «Le gouvernement a l’intention de mobiliser près de 11% du PIB sous forme de garanties de prêts, d’injections directes de fonds propres dans les entreprises marocaines et de donner une nouvelle impulsion aux partenariats public-privé liés aux infrastructures. À cette fin, un nouveau fonds d’investissement stratégique est en cours de création et l’Agence centrale de garantie se transforme en société anonyme. Par ailleurs, diverses réformes structurelles importantes ont été annoncées, notamment la généralisation de l’assurance maladie, une refonte du système de protection sociale autour d’une universalisation des allocations familiales, la rationalisation du vaste réseau des entreprises publiques (SOE) du Maroc et un certain nombre de des mesures destinées notamment à soutenir le secteur des PME dans la reprise» détaille la Banque mondiale.
Selon la même source, «6,1% des entreprises du secteur formel interrogées ont cessé leurs activités et 86,9% signalent une baisse des ventes de 50,4% en moyenne par rapport à leur niveau d’avant la pandémie. L’enquête fournit également des informations sur les stratégies d’adaptation des entreprises marocaines, ce qui inclut un recours croissant aux lignes de soutien du gouvernement, une réduction du nombre d’heures travaillées (mais, comparativement, moins de licenciements que dans d’autres pays), l’utilisation de fonds internes pour faire face aux pénuries de trésorerie et accroître l’activité commerciale en ligne.»
À l’avenir, la crise actuelle «offre une fenêtre d’opportunité pour éliminer les contraintes qui dans le passé ont limité le développement d’un secteur privé plus dynamique» explicite-t-on. «À court terme, il est toujours essentiel d’utiliser tout l’espace politique disponible pour injecter des liquidités et des fonds propres dans le secteur privé pour éviter que les problèmes de liquidité ne se transforment en une vague d’insolvabilité des entreprises. Dans une perspective à plus long terme, le Maroc pourrait stimuler la concurrence et uniformiser les règles du jeu pour les nouveaux entrants sur les marchés des biens et services, tout en améliorant son capital humain et ses cadres institutionnels. En outre, des politiques industrielles appropriées contribueraient à consolider la position du Maroc en tant que destination de quasi-acheminement pour les entreprises multinationales et à tirer ainsi parti des opportunités stratégiques qui pourraient émerger au niveau mondial dans le monde postpandémique», conclut-on.