Les militaires maliens mécontents du nouveau gouvernement annoncé par les autorités de transition ont emmené de force le président et le Premier ministre, lundi au camp militaire de Kati, à quelques kilomètres de Bamako, dans un coup de force secouant le pays plongé dans une crise profonde.
Aux dernières informations rapportées par Jeune Afrique et confirmées par des sources au Conseil national de la transition (CNT), Bah N’Daw, président de la transition, et Moctar Ouane, Premier ministre, ont été « conduits sous escorte militaire à Kati », ce haut lieu de l’appareil militaire malien.
Ironie du sort, c’est là que le président élu Ibrahim Boubacar Keïta avait été emmené de force le 18 août 2020 par des colonels putschistes pour annoncer sa démission. Neuf mois plus tard, les mêmes colonels seraient derrière l’arrestation de Bah N’Daw et Moctar Ouane.
Ce coup de force par la junte, est survenu quelques heures seulement après l’annonce d’un nouveau gouvernement, plus ouvert mais dominé par les militaires. Ceux-ci s’étaient engagés, sous pression internationale, à rendre le pouvoir à des civils élus au bout de 18 mois.
Dix jours auparavant, face à une contestation politique et sociale forte, le Premier ministre avait présenté la démission de son gouvernement pour être aussitôt reconduit dans ses fonctions par le président de transition Ndaw, avec la mission de former une équipe d’ouverture.
Dans le gouvernement annoncé par la présidence de transition, les militaires détiennent toujours les ministères de la Défense, de la Sécurité, de l’Administration territoriale et de la Réconciliation nationale.
Des changements ont cependant été annoncés dans un communiqué lu à la radio-télévision publique : les colonels Sadio Camara et Modibo Kone, quittaient leurs portefeuilles respectifs de la Défense et de la Sécurité. Ils ont été remplacés respectivement par le général Souleymane Doucoure et par le général Mamadou Lamine Ballo.
Le nouveau gouvernement accueillait également – à l’Education et aux Affaires foncières – deux ministres membres de l’Union pour la République et la Démocratie (URD), principale force politique du Mouvement du 5-Juin (M5), le collectif qui avait animé la contestation ayant débouché sur le renversement du président Keïta. Un gouvernement certes plus ouvert mais qui ne répond pas aux deux mesures que le M5-RFP (Mouvement du 5 juin-Rassemblement des Forces Patriotiques) avait soumises au gouvernement de transition.
«Annonce d’un référendum»
«Par ce remaniement, le président de transition et son Premier ministre ont voulu lancer un message ferme : le respect du délai de la transition reste la priorité», avait expliqué à l’AFP une source proche de la présidence ayant requis l’anonymat. Selon cette source, «un réajustement était nécessaire aux postes de la Défense et de la Sécurité», dont les nouveaux titulaires «ne sont pas des figures emblématiques de la junte».
Mi-avril, les autorités de transition ont annoncé l’organisation le 31 octobre d’un référendum sur une révision constitutionnelle. Elles ont également prévu les élections présidentielle et législatives en février-mars 2022, « à l’issue desquelles elles rendraient le pouvoir à des dirigeants civils ».
Comment s’en tenir à cet agenda dans cette situation politique confuse, de fronde sociale et ce, dans un contexte où les violences continuent d’être perpétrées, celles liées au jihadisme comprises ?