Environ 180.000 entreprises font de la rétention de paiements, souvent sans qu’elles aient des difficultés de trésorerie. Jusqu’à 8 mois pour se faire payer en 2019 et la situation pourrait se dégrader en 2020 !
Selon les données de la Direction générale des impôts (DGI), ce sont plus de 180.000 structures qui paient en retard sur les 260.000 aujourd’hui en activité. Moins de 80.000 entreprises paient à temps et observent un comportement de paiement sain et exemplaire.
Après plusieurs relances infructueuses pour l’encaissement d’une facture, certaines entreprises sont obligées de céder parfois au chantage de leurs clients. Pour éviter de s’engager dans une procédure judiciaire longue et coûteuse, elles sont contraintes de concéder une ristourne pour être remboursées et surtout, ne pas tout perdre, rapporte l’économiste dans son édition du jour.
Selon une enquête d’Inforisk, spécialiste de l’information sur les entreprises au Maroc, les délais de paiement se sont dégradés de 24 jours à 212 jours en moyenne pour les TPE en 2018. Ils se sont ainsi établis à 113 jours pour les PME, soit -3 jours sur un an, et 96 jours, soit +4 jours, pour les grandes entreprises. Au niveau sectoriel, les délais clients frôlent ou dépassent 200 jours dans la construction, les services aux entreprises, les télécommunications. Mais les entreprises y règlent leurs fournisseurs autour de 100 jours. Les délais clients et fournisseurs s’affichent à 50 jours dans l’hôtellerie et la restauration. Le premier grimpe à 157 jours dans le commerce de détail contre 102 jours pour les délais fournisseurs.
Après les multiples mises en garde, le gouvernement veut sortir le bâton pour dissuader les mauvais payeurs. Les entreprises dont les délais
de paiement seront supérieurs aux limites réglementaires se verront infliger des sanctions pécuniaires. Les cycles d’exploitation n’étant pas les mêmes selon les activités, le gouvernement va parallèlement réactiver les accords dérogatoires pour une période déterminée pour les branches professionnelles qui le souhaiteraient d’appliquer des délais supérieurs à 90 jours. Une fois le dispositif de sanction opérationnel, 3 entreprises sur 4 seraient passibles d’une amende.
Soulignons que le nouveau projet de loi apportant de nouveaux amendements à la loi 49-15 modifiant et complétant la loi n°15-95 formant code de commerce et édictant des dispositions particulières relatives aux délais de paiement, a été approuvé le 27 février dernier par le Conseil de gouvernement.
Le projet de loi soumis jeudi 27 février au conseil de gouvernement apporte des changements notamment à l’article 3 de la loi sur les délais de paiement. Il fixe au 31 décembre 2023 la possibilité de signer des accords interprofessionnels. Ce sursis ne doit être accordé que sous certaines conditions. La première n’est autre que la motivation du dépassement du délai légal pour des raisons économiques objectives et spécifiques au secteur. Les branches professionnelles doivent s’appuyer sur les délais de paiement observés dans le secteur au cours des trois derniers exercices précédant l’accord.
La deuxième condition fixe les mesures que la convention doit prévoir. Il s’agit notamment de la réduction progressive du délai dérogatoire, selon un calendrier, qui aboutirait à l’alignement sur le délai légal. S’y ajoute l’application de l’indemnité de retard en cas de non-respect du délai dérogatoire. Les accords conclus devraient être par la suite approuvés par décret après avis du Conseil de la concurrence. L’autre changement concerne l’article 4 de la loi. Il s’adresse aux secteurs qui ont certaines spécificités et/ou un caractère saisonnier. Dans ce cas, les conventions sur des délais de paiement spécifiques doivent s’appuyer sur des études objectives. Là aussi l’avis du Conseil de la concurrence est requis.