L’économie marocaine a été lourdement impactée par la crise du coronavirus. Les milieux économiques exhortent à une reprise des activités puisque la crise sanitaire a mis à l’arrêt quelque 132.000 entreprises, soit environ 60% du secteur formel. De plus, 950.000 salariés ainsi que 4,3 millions de familles ont été privés de revenus tirés du secteur informel ou d’emplois précaires.
A un jour de la levée progressive du confinement, l’Exécutif n’a pas encore mis en place un plan de relance économique. Alors que le gouvernement est supposé, en principe, préparer, dans les plus brefs délais, un projet de loi de finances rectificative en réponse à cette conjoncture économique, aucune annonce n’a encore été faite pour annoncer sa finalisation pour qu’il soit présenté au Parlement.
Soulignons qu’une Loi de Finances rectificative a déjà été revendiquée par de nombreux parlementaires et économistes pour la bonne raison que les hypothèses de la loi de Finances 2020 sont devenues caduques. De plus, plusieurs entreprises sont à l’arrêt, les cours de la bourse plongent puis remontent timidement. La chaîne d’approvisionnement est aussi grippée. Ensuite, l’économie nationale n’aura droit qu’à un modeste rebond en 2020. Et seulement si elle parvient à éviter les nombreux pièges qui se dresseront sur son chemin. Les cieux n’ont pas été très généreux cette année et les conditions actuelles suggèrent que nous sommes en trajectoire pour la plus faible croissance en deux décennies.
Le Maroc est aujourd’hui appelé à jouer le tout pour le tout pour faire repartir sa croissance qui est, à l’heure actuelle, au bord de l’asphyxie. Une loi de Finances rectificative serait ainsi le maître-mot et la condition sine qua non pour rectifier le tir au niveau des dépenses ordinaires et de dépenses d’investissement et de financement de l’économie nationale. Selon Driss Effina, professeur universitaire et président du Directoire du Centre indépendant des analyses stratégiques, le confinement qui a été décidé par le gouvernement a été basé sur la propagation de l’épidémie au Maroc. Il s’agit, d’après lui, d’une décision sage qui avait pour objectif de sauvegarder la santé du capital humain. Cependant, cette décision a donné lieu à une crise.
« C’est une crise qui n’a pas été subie, elle a été provoquée par la décision sage du confinement. Aujourd’hui, le retour à la situation normale demande le recours à un confinement rapide surtout que la situation épidémique au Maroc est aujourd’hui maîtrisée. Chaque jour de confinement nous coûte 3 MMDH de chiffre d’affaires. En effet, le volume d’activité perdu est de 3 MMDH, dont 1 MMDH de valeur ajoutée », a-t-il indiqué. « Le premier pas pour relancer l’économie est tout d’abord de déconfiner rapidement et mettre en place des protocoles sanitaires nécessaires pour éviter de nouvelles vagues de propagation », poursuit-il.
S’agissant du plan de relance économique, le président du Directoire du Centre indépendant des analyses stratégiques rappelle que plusieurs mesures ont été prises en faveur du secteur privé, telles que le report des échéances bancaires et sociales ainsi que le produit DAMANE Oxygène. Toutefois, l’adoption d’une loi de finances rectificative est aujourd’hui nécessaire. « Aucun plan de relance n’a de sens sans une loi de finances rectificative. C’est elle qui va annoncer la couleur du plan de relance puisqu’elle décrète les bases de financement. Elle annoncera les mesures sectorielles qui seront prises par le gouvernement et détaillera comment l’Etat va agir par rapport à l’investissement », souligne-t-il, tout en rappelant que l’Etat a perdu chaque mois presque 30% de sa recette fiscale, il est ainsi en situation déficitaire.
Il revient également sur les appels d’offres présentés au cours de cette période de confinement qu’il estime « très faibles ». Il se demande ainsi comment l’Etat va maintenir ses dépenses, à savoir les 90 MMDH d’investissement prévus dans la LF 2020. Aujourd’hui, même les entreprises publiques demandent des aides. Il précise que lorsque l’Etat va investir de mois en moins, les entreprises privées auront des problèmes au niveau de la réalisation de leurs CA et en termes du maintien des effectifs.
Quant à la question de l’endettement, Driss Effina indique que le Maroc compte financer son économie à travers la dette. Dans ce contexte, les choix des investissements sont cruciaux et doivent être discutés au Parlement puisque chaque dirham investi par l’Etat a un impact sur les échanges extérieurs. Il rappelle dans ce sens que si l’Etat maintient les anciens investissements, ceci va se répercuter sur l’économie marocaine. Il s’agit ainsi d’une équation difficile à gérer et qui doit être discutée avec BAM et les autres partenaires économiques. Il faut donc actuellement gérer convenablement les réserves de devises surtout que les importations sont de plus en plus élevées par rapport aux exportations. Il est donc essentiel d’établir une liste noire des importations qui risquent de nuire au Maroc.