Le pouvoir algérien entend continuer à être le maître du jeu malgré le soulèvement populaire qui souhaite peser sur le cours des événements. Alors que l’armée refuse que le contexte de vacance structurelle de la présidence de la République s’éternise, la rue réclame le départ de la nébuleuse qui tient les commandes.
Le vendredi, jour de grande manifestation depuis bientôt trente-quatre semaines. Ce 11 octobre, un dispositif policier d’envergure dans les rues du centre d’Alger et des barrages déployés sur les routes menant à la capitale fractionnent les foules souhaitant renforcer le cortège. Les manifestations hebdomadaires ont chuté de centaines de milliers au printemps à des dizaines de milliers maintenant, mais restent un défi substantiel pour les autorités avant le vote du 12 décembre. Avec plus de policiers lors des manifestations et en arrêtant des personnalités de l’opposition, les autorités ont renforcé la pression sur les protestataires ces dernières semaines.
Les autorités électorales ont appelé cette semaine les manifestants à aider à superviser le vote afin d’en garantir la transparence, ce qui est considéré comme la plus récente des tentatives visant à calmer la rue. Le mouvement de protestation, sans chef autoproclamé, a rejeté toute participation à ces échéances aussitôt que des alliés de l’ancien président Abdelaziz Bouteflika sont toujours au pouvoir, affirmant qu’elles ne peuvent être ni libres ni équitables dans cet état des choses. Dans un pays où les disparités et les inégalités sociales demeurent considérables, le pouvoir cherche à reprendre l’initiative politique face à la rue qui fait entendre ses revendications depuis plusieurs mois.
Abdelaziz Bouteflika a démissionné en avril à la suite des manifestations de masse qui ont éclaté en février, exigeant le retrait de l’élite dirigeante et la poursuite des personnes soupçonnées de corruption. L’armée, acteur principal de la politique algérienne depuis la démission de Bouteflika, a répété à maintes reprises que les élections seraient le seul moyen de sortir de la crise, en promettant que l’autorité électorale était habilitée à assurer l’organisation d’élections transparentes.
« Les élections constituent un événement historique et décisif », a déclaré le chef de l’autorité électorale, Mohamed Charfi, cette semaine, avant d’ajouter que «Les jeunes du hirak (mouvement de protestation) sont invités à participer à la supervision du processus depuis les bureaux de vote, ainsi qu’au suivi des opérations et du dépouillement».
Cette annonce fait suite à l’arrestation de certaines personnalités de l’opposition qui ont soutenu les manifestations dans un mouvement jugé antidémocratique par les opposants. Le 10 octobre, Abdelwahab Fersaoui, président du Rassemblement action jeunesse (RAJ), une association activement impliquée dans le mouvement de contestation populaire en Algérie, a été interpellé par des policiers en civil à la fin d’une action organisée en soutien à des détenus d’opinion.
Plus de 139 personnalités, dont la plupart sont connues du public, ont déclaré qu’elles se présenteraient aux élections en promettant de rompre avec le système de Bouteflika.






