L’opposant Fodil Boumala était de toutes les manifestations du Hirak, jusqu’à son arrestation mi-septembre 2019.
Un an de prison ferme a été requis contre Fodil Boumala, opposant et figure de la contestation qui agite l’Algérie depuis un an, jugé notamment pour «atteinte à l’intégrité du territoire», a annoncé, lundi 24 février, une association. Ancien journaliste de la télévision nationale et cofondateur en 2011 d’un mouvement citoyen d’opposition, M. Boumala a comparu dimanche durant seize heures devant un tribunal d’une banlieue d’Alger, qui a renvoyé son verdict au 1er mars, selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD).
En détention provisoire depuis son arrestation à la mi-septembre 2019, M. Boumala était jugé, selon le CNLD, pour «atteinte à l’intégrité du territoire », crime passible de dix ans de prison, et «diffusion de publications pouvant porter atteinte à l’intérêt national», délit passible d’un an d’emprisonnement. Avant son arrestation, M. Boumala était de toutes les manifestations du Hirak, le mouvement populaire de contestation né en février 2019 en Algérie pour s’opposer à la candidature annoncée à un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika, finalement contraint à la démission le 2 avril suivant.
Les arrestations se sont multipliées dans les rangs de la contestation à partir de juin et l’échec du pouvoir – ouvertement exercé par la haute hiérarchie militaire après la démission de M. Bouteflika – à organiser une présidentielle en juillet pour lui trouver un successeur.
Autre figure majeure de la contestation détenue depuis septembre, Karim Tabbou, patron de la petite Union démocratique et sociale (UDS, parti non enregistré), sera lui jugé le 4 mars, a indiqué à l’AFP Me Nourredine Benissad, membre du collectif de défense. Il est aussi inculpé d’«atteinte à l’intégrité du territoire» et aux termes de l’article 74 du Code pénal réprimant les «actions violentes» pour « entraver la circulation de matériel militaire », selon Me Benissad.
Le 15 mars, un tribunal algérois jugera pour « contrebande de marchandise », délit passible de cinq ans de prison, un journaliste, Sofiane Merakchi, a indiqué Khaled Drareni, journaliste et correspondant en Algérie de Reporters sans frontières (RSF). Il lui est reproché l’importation de matériel audiovisuel, mais selon M. Drareni, le «vrai grief non avoué» contre M. Merakchi est qu’il a fourni des images des manifestations à des médias étrangers.
Vendredi, la 53e manifestation hebdomadaire consécutive du Hirak a drainé une foule immense à Alger et de nombreuses villes du pays, montrant que la contestation est toujours vivace, malgré les engagements du nouveau président, Abdelmadjid Tebboune. Elu en décembre lors d’une présidentielle rejetée par la contestation et boudée par les électeurs, il a depuis promis un « changement radical » dans le mode de pouvoir en Algérie.
Fondé pour soutenir les personnes arrêtées dans le cadre de la contestation, le CNLD a recensé, début février, « 142 manifestants en détention provisoire » et 1 300 autres poursuivis pour avoir tenté de perturber la campagne présidentielle. Dimanche, 20 manifestants, dont deux militants du Rassemblement action jeunesse (RAJ), association citoyenne en pointe dans le Hirak, ont été condamnés à Alger à des peines de trois mois à un an ferme, pour «attroupement non armé», «atteinte à l’intégrité du territoire» et, pour le plus lourdement condamné, pour avoir refusé de présenter ses papiers à un policier en civil. Lundi, 21 manifestants ont été condamnés à Alger à une amende d’environ 380 euros – somme importante dans un pays où le salaire moyen est d’environ 300 euros – pour «attroupement non armé» et «troubles de l’ordre public».