Les ratages dans la gestion des catastrophes routières interpelle. Que ce soit à Taza ou à Taounate, les victimes des deux accidents de la circulation et leurs images mortuaires sont comme tombées dans une faille du politique. Aucune réaction officielle, aucun hommage, aucun déplacement du ministre de l’Equipement et du Transport, ni du chef du gouvernement.
Les responsables politiques, membres du gouvernement n’ont pas réagi après l’accident de la circulation survenu à Taza qui a fait 8 morts et 42 blessés. Aucun ne s’est rendu sur les lieux, à Taounate, où dix-huit élèves ont été blessés dans la collision de leur autocar scolaire avec un poids lourd. Aucun n’a commenté les événements ou annoncé des mesures à forte charge symbolique. Les autorités locales étaient certes sur place, mais après l’hécatombe de Tazaet l’émotion suscitée par l’accident des lycéens, l’opinion publique s’attendait à lire une publication ou un communiqué de sympathie de El Othmani et d’Amara, ainsi que de les voir se précipiter au chevet des blessés et d’être auprès de leurs familles. Car il s’agit d’une situation de crise qui en appelle au partage des responsabilités entre les instances politiques. Les bilans des blessés et des pertes humaines restent provisoires.
Aux lieux du drame, aucun représentant du gouvernement n’a fait le déplacement. Abdelkader Amara, actif sur les réseaux sociaux, n’a rien posté. Le chef de l’exécutif, Saâdeddine El Othmani, n’a rien tweeté. Cependant, à Taza et à Taounate, étaient visibles des traces mortuaires : les cadavres retirés des véhicules, les blessés secourus, les objets personnels éparpillés, le deuil des survivants, les visages ensanglantés, les consolations impossibles. Ces accidents signeront l’inscription définitive du thème de l’insécurité routière dans le débat public, même s’il n’entraîne pas, ou peu, d’implication des hommes politiques.
Ces accidents font surgir du dépit, de l’incompréhension, de l’émotion. Les deux événements ont entraîné une couverture médiatique immédiate et une émotion vive des internautes lambdas. Les photos des victimes sont diffusées, évoquées et montrées en boucle, des sacs mortuaires ; des rescapés en couvertures, les secouristes épuisés, des personnes en pleurs. L’empathie du ministre de tutelle est introuvable.
Le gouvernement n’intervient contre l’insécurité routière qu’en tant que timide force de proposition. Alors qu’une véritable mise en administration de l’action publique pour limiter les accidents de la circulation peine à s’opérer, les victimes restent privées d’un deuil public, d’une visite sur place des représentants officiels et de l’attention des cercles nationaux. Sous d’autres cieux, la mobilisation commence dès les premières heures et se déroule la plupart du temps sur les lieux mêmes ; elle est marquée par la tonalité grave des déclarations. Au Maroc, les morts et blessés des routes, corps et identités de personnes, sont privés du langage de l’action officielle. Ils sombrent dans l’indifférence, à quelques rares exceptions près.