Les derniers discours royaux ont insisté sur l’importance du développement du secteur privé. En octobre, le discours du Roi Mohammed VI à l’occasion de l’ouverture de l’actuelle année législative a appelé les banques à remplir pleinement leur rôle dans la promotion du financement des TMPE et des auto-entrepreneurs. Aujourd’hui, les solutions prennent place petit à petit.
Essentielles dans l’écosystème économique marocain, puisque les TPME en représentent 95%, mais aussi très fragiles, les chiffres ne sont guère joyeux. 5.810 TPE ont fait faillite en 2015 et 10.000 en 2018, plusieurs autres sont en activité lente puisqu’elles manquent de moyens ou faute de bonne gestion.
Pourtant, de plus en plus de solutions commencent à se profiler. A commencer par les associations de micro-crédit, lesquelles ont commencé à octroyer des prêts à 150.000 dhs. Le plafond a été relevé de 50.000 dhs à 150.000 dhs il y a un an, suite à l’adoption de la loi 85-18 modifiant la loi 18-97 relative aux micro-crédits. Certes, ces avancées n’ont pas encore été adoptées par toutes les banques, ce sont surtout les structures disposant de bases financières importantes pour accorder des sommes aussi élevées qui se sont lancées. Outre la base financière, une telle ouverture nécessite aussi des moyens humains, techniques et des agences dédiées. Dans ce sens, l’hebdomadaire La Vie Eco, dans sa livraison de cette semaine, présente l’association Al Amana Microfinance comme pionnière dans le secteur. «Nous comptons déjà des crédits octroyés à un montant de 150.000 dhs à des TPE. Nous sommes liés à un partenaire allemand, en partenariat avec BEI et Proparco, afin de bénéficier d’un accompagnement dans la construction d’un portefeuille et dans la mise en place d’un dispositif, avec des agences dédiées à cette catégorie de clientèle», souligne Youssef Bencheqroun, directeur général d’Al Amana à l’hebdomadaire. Une grande nouveauté également : la mise en place de la plateforme Rifso, qui sert à canaliser les demandes de crédits. C’est la première Fintech marocaine qui a développé une marketplace dématérialisée de bout en bout pour faciliter l’accès au financement de l’exploitation des TPE, des auto-entrepreneurs et des professionnels, tout en favorisant l’inclusion financière avec des taux d’intérêt seraient moins élevés que ceux accordés aux particuliers.
Parmi les avancées les plus récentes, la signature d’une convention de partenariat entre la Confédération marocaine de TPE-PME et Bti Bank. Un accord visant à soutenir le tissu des petites entreprises marocaines à travers la mise en circulation de produits et de services participatifs dédiés. La convention couvre deux volets relatifs au soutien des entreprises. D’une part, les deux organismes mettront en place des comités d’étude et de travail conjoints débouchant sur une offre pertinente de produits financiers participatifs et de programmes d’accompagnement. D’autre part, ce partenariat constitue un catalyseur des programmes d’appui à la TPE-PME avec l’implication de parties tiers à forte valeur ajoutée pour la TPE-PME. « Plus de 95% du tissu économique local est porté par les TPE et PME, qui sont aussi les 1ers créateurs d’emplois au Maroc. S’il s’agit en premier lieu d’une orientation intelligente des investissements financiers à destination des projets prometteurs, il ne faut pas non plus négliger une approche plus qualitative à travers un dispositif d’accompagnement, de conseil et de formation qui permettra à terme la meilleure exploitation des ressources allouées », souligne, dans un communiqué, Mohamed Maârouf, directeur général de BTI Bank.
Ajoutons-y le fait qu’au Maroc, une entreprise sur cinq recourt au financement externe, dont 93% provient du crédit bancaire, selon les résultats de l’enquête nationale menée par le Haut-commissariat au Plan (HCP) entre janvier et juillet 2019 auprès des entreprises. Cette proportion s’élève à 46% pour les grandes entreprises (GE) contre 18% pour TPME. Cet écart entre les pourcentages s’explique surtout par le taux d’intérêt élevé ainsi que par les garanties draconiennes exigées par les banques. L’enquête révèle également que près de 33% des entreprises évitent de recourir au crédit bancaire pour des raisons religieuses. La dernière enquête du HCP sur l’environnement économique de l’entreprise démontre également que sur 2.101 entreprises dans différents secteurs, le 1/3 a affirmé qu’il était davantage difficile d’accéder à du financement bancaire ces 3 dernières années. Il s’agit d’un cercle vicieux, les créances se portent mal et, entre les banques et les TPE sévit une réelle crise de confiance à cause du manque de garanties suffisantes pour l’accès au crédit auprès du secteur bancaire, mais aussi à cause de nombreux impayés vu les taux élevés.
Dans ce sens, la plateforme Rifso se présente comme une bouffée d’air frais puisqu’elle simplifie les procédures, économise du temps et de l’effort, et favorise l’octroi au micro-crédit. L’Etat aussi met la main à la pâte, puisqu’il a été spécialement exhorté par le Roi de trouver des solutions à la situation précaire des TPME. Dans ce sens, le gouvernement, Bank-Al Maghrib (BAM) et le Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM) se sont alliés afin de créer un mécanisme de financement fiable et durable. Des réunions régulières sont tenues entre ces trois parties pour opérationnaliser ce mécanisme au premier trimestre 2020. Première initiative de ce mécanisme un fonds d’appui au financement de l’entreprenariat, qui a été prévu dans la loi de Finances 2020, doté de 6 milliards de dhs sur une durée de 3 ans, et qui sera financé par l’Etat, BAM et le GPBM.
Il est encore trop tôt pour évaluer la portée de toutes ces solutions mises en place. En attendant, beaucoup d’autres banques et institutions élaborent leur rang de produits à cet effet. Si les institutions financières en tous genres sont capables de remédier aux trois problèmes majeurs que rencontrent les TPME dans leur recherche de financement, à savoir, les garanties draconiennes, les taux exorbitants et un bon suivi, les TMPE pourront occuper autant de place que de poids dans l’économie marocaine et redoubler de valeur ajoutée.