A quelques jours de l’ouverture de la session parlementaire d’avril, le Maroc ne dispose toujours pas d’un gouvernement et cela dure depuis le scrutin législatif du 7 octobre dernier.
Bientôt six mois que ce pays fonctionne sans gouvernement, et les marocains semblent s’en être accommodés et franchement désintéressés car se sentant trahis par cette élite qui pense plus au pouvoir qu’à l’intérêt du pays et des citoyens qui leur ont fait confiance.
Ces marocains semblent également lassés de voir les mêmes analystes et « spécialistes » de la chose politique occuper les plateaux de télévision, certains ayant déserté les universités pour venir expliquer le comment et le pourquoi de cet immobilisme en échange d’enveloppes consistantes, d’où cette situation de rente qui s’est développée en parallèle et dont ils profitent au maximum.
Ces marocains semblent par ailleurs se résigner à cette situation et s’en mordent les doigts regrettant le jour où ils se sont rendus aux urnes pour accomplir leur devoir de citoyen espérant que leur élite entende leurs doléances et réalise leurs aspirations, mais qui, en lieu et place, a fait preuve d’un mépris total à leur égard, obnubilée qu’elle est par la chasse aux portefeuilles ministériels.
Le pire dans tout cela, c’est que la facture de tout cet immobilisme sur tous les plans, ce sont ces mêmes marocains qui vont la payer, car au pays des mille et un contraste, la reddition des comptes ne fait pas partie de notre culture, ni figure-t-elle dans le lexique de cette élite qui se bouscule et se dispute pour les maroquins.
Avec les six partis choisis (PJD, RNI, PPS, MP, UC et USFP) pour former une majorité gouvernementale au forceps complètement défigurée et où socialistes se mêlent à leurs frères ennemis islamistes, et ou les libéraux côtoient les communistes, et où ces derniers flirtent avec les conservateurs et les partis dits de « l’administration », il va falloir au chef d’orchestre Saadeddine El Othmani d’user de sa potion magique de sage pour satisfaire tout ce beau monde. Et d’ores et déjà, et comme cela a été annoncé par le remplaçant de Benkirane démis pour avoir fait traîner, à cause ou malgré lui, pendant 5 mois cette situation de blocage, la nouvelle équipe sera tout sauf réduite. Et plus le nombre de portefeuilles est élevé, plus la facture sera salée pour les contribuables.
Cette situation qui perdure encore malgré les promesses d’El Othmani d’accélérer le processus, se déroule alors que qu’au nord du royaume, plus précisément à Sebta se déroule une tragédie qui fait la honte de l’Etat, celle des porteurs et femmes-mulet dont une a trouvé la mort, faisant la une de la presse espagnole ces derniers jours, et face à laquelle les différents partis marocains à l’exception du PAM, ont préféré tourner le dos car occupés à se partager les maroquins.
Cette situation d’immobilisme prévaut alors qu’aux frontières sud, et particulièrement à El Guergarat, les séparatistes du Polisario nous narguent, et font chanter les camionneurs marocains en direction de Mauritanie, et alors que le Conseil de sécurité s’apprête à examiner le rapport du secrétaire général de l’ONU sur le Sahara et à renouveler le mandat de la Minurso. Cette situation perdure en outre alors que des enfants marocains, abandonnées à leur sort, dans les rues de Paris, font eux aussi la une des journaux et télévisions, et l’objet de dénonciation de la part des riverains inquiets pour leur sécurité face à la présence de ces drogués. Le même scénario se produit à Sebta et Melillia où là aussi des dizaines de mineurs errent dans les rues n’hésitant pas à recourir à la violence comme ce fut le cas du meurtre d’un de leurs compatriotes à Sebta pour le lui subtiliser son téléphone portable.
Entre-temps, au Maroc, c’est motus et bouche cousue au sein de l’élite politique, de la société civile, et surtout du gouvernement, ou ce qui en reste, chargé d’expédier les affaires courantes.
Face à cette attitude indigne de ceux qui aspirent à présider aux destinées de tout un peuple, tout porte à croire que les marocains, ou du moins bon nombre d’entre eux, vont ou ont déjà tourné le dos définitivement à cette élite, ce qui fait que pour eux, l’accouchement tant attendu d’un gouvernement constitue désormais un non-événement.