Le monde connaît des bouleversements rapides, parfois imprévisibles. Personne ne pensait que l’extrême droite remporterait les élections européennes en France et qu’elle se hisserait au rang de premier parti dans le pays de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Mais il faut convenir qu’il s’agit d’une progression amorcée depuis plusieurs années et qui s’est renforcée avec le déclin des partis traditionnels en France et la fin de la bipolarisation qui caractérisait pendant plusieurs décennies le paysage politique dans ce pays (droite, Gauche). Il faut également convenir que la droite française a pour longtemps pris en charge les destinées de la France, jusqu’en 1981, date à laquelle un immense enthousiasme s’empara du pays, qui réalisa son rêve enfin socialiste. Ce rêve ne tarda pas à se briser, avec le rappel, quelques années plus tard, de la droite au pouvoir.
En fait, il s’agissait d’une alternance, qui est une règle d’or d’une démocratie libérale. L’usure du pouvoir a condamné les uns après les autres à chuter en crédibilité et en popularité, en raison des difficultés des populations, qui se sont accrues au fil des années, et de l’incapacité du pouvoir à améliorer les conditions de vie des citoyens.
Les électeurs se rabattent alors sur l’extrême droite qui, dans le cadre d’une tendance globale dans plusieurs pays européens, présente une nouvelle recette pour régler les problèmes des français : la sécurité des français en liaison avec l’immigration. En fait, la montée de l’extrême droite, qui provoque une extrême et grave alerte au danger de tous les partis politiques confondus ainsi que de l’immigration étrangère ou d’origine étrangère, s’inscrit, elle aussi, dans le cadre d’une alternance au pouvoir. Chacun sait que la raison d’être d’un parti politique, de surcroît légal, est de gouverner, via des élections libres et démocratiques. Si la majorité des français décident, dimanche, de transférer le pouvoir intégral à l’extrême droite, nous assisterons à une nouvelle cohabitation où le président français dégagerait plus de temps pour sa vie familiale et privée, dès lors que le pouvoir, l’essentiel du pouvoir, sera transféré à Matignon.
Dans une telle hypothèse, le Maroc ne perdrait pas, à priori, si l’on se fie à certains dirigeants du RN, autant de temps et d’occasions qu’avec la gouvernance de la droite sortante. Cette maxime a été celle de feu Hassan II, lorsque le FIS était sur le point de gouverner en Algérie. Le souverain défunt se serait dit qu’après tout, le FIS ne serait pas aussi mauvais que le FLN, source de tous les malheurs du Maghreb pendant trois décennie et bien plus.
Ces élections anticipées, décidées par le président Emmanuel Macron, risquent par ailleurs de bouleverser l’agenda officiel du chef de l’Etat français, qui s’était engagé à recevoir son homologue algérien, au mois d’octobre, alors que l’extrême droite prône un durcissement à l’égard de l’Algérie. Quant à sa visite au Maroc, aucune date n’avait encore été annoncée officiellement, de part et d’autre.
*journaliste et écrivain