La loi de Finances propose une nouvelle amnistie aux contribuables – ménages ou entreprises – disposant d’importantes ressources et qui ont échappé à leurs obligations fiscales. Une mesure qui intervient alors que le gouvernement cherche à protéger les ressources de l’État confronté aux défis financiers, reste contestée.
Le Maroc lancera du 1er janvier jusqu’au 31 octobre 2020 une nouvelle action qui concerne certains citoyens marocains dans le cadre d’une initiative d’amnistie. Cette opération concerne les «personnes physiques et morales bénéficiant d’une résidence, d’un siège social ou d’un domicile fiscal au Maroc», ayant commis des comportements d’évitement de l’impôt, précise le projet de loi de finances débattu au Parlement et approuvé par le gouvernement la semaine dernière.
L’émigration massive de fonds n’est pas la seule infraction mentionnée par le document budgétaire, il mentionne également «les biens immeubles détenus sous quelque forme à l’étranger ; les actifs financiers et de valeurs mobilières et autres titres de capital et de créances détenus à l’étranger et les avoirs liquides déposés dans des comptes ouverts auprès d’organismes financiers, d’organismes de crédit ou de banques situés à l’étranger».
La contribution libératoire se divise en plusieurs «10% de la valeur d’acquisition des biens immeubles» ; «10% de la valeur de souscription ou d’acquisition des actifs financiers et des valeurs mobilières et autres titres de capital ou de créances» ; «5% du montant des avoirs liquides en devises rapatriés au Maroc et déposés dans des comptes en devises ou en dirhams convertibles» et «2% des liquidités en devises rapatriées au Maroc et cédées sur le marché des changes au Maroc contre le dirham».
La «garantie de l’anonymat couvrant l’ensemble des opérations effectuées durant la période de cette régularisation» est assurée, affirme l’exécutif, qui déclare qu’«les personnes concernées par cette opération ne exemptées de toute poursuite administrative ou pénale.»
Le manque à gagner en recettes fiscales chaque année est estimé à des centaines de milliards de dirhams. Les professions du chiffre – experts comptables, avocats fiscalistes et acteurs de la société civile déplorent que les entreprises et les contribuables aisés ne soient que peu visés par la lutte contre la fraude fiscale. Pour redresser les finances publiques, le gouvernement épargne les puissants qui contournent l’impôt et dévitalise le contenu moral de la lutte contre l’injustice fiscale. Des spécialistes dans le monde financier critiquent une régulation à plusieurs vitesses, selon les types des populations concernées, alors que des décisions courageuses s’imposent pour limiter l’aggravation du déficit des finances publiques. Cette amnistie prend des libertés avec le principe d’égalité de traitement de tous devant l’impôt et fait perdre à l’État des milliards de dirhams.
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