Le ministre de la Justice gambien a décidé, lundi, de libérer trois proches de l’ex-président Jammeh qui ont avoué avoir commis des assassinats, et ce, dans le cadre de la Commission vérité et réconciliation sur les violations des droits de l’Homme en Gambie. Une décision de libération très critiquée par les proches des victimes.
Trois « junglers » vont être remis en liberté en Gambie. Malick Jatta, Omar Jallow et Amadou Badjie, anciens membres des escadrons de la mort de l’ex-président Yahya Jammeh, seront libérés, selon une décision du ministre gambien de la Justice, Abubacarr Tambadou, lundi 5 août. Et ce, deux semaines après le témoignage des trois hommes devant la Commission vérité et réconciliation (TRRC) où ils ont reconnu avoir commis des dizaines d’assassinats sous les ordres de l’ex-président gambien Yahya Jammeh.
Critiquée par des proches de victimes, cette décision de remettre en liberté les anciens « junglers » vise à encourager d’autres auteurs présumés de violations des droits humains à venir témoigner, a expliqué devant la presse Abubacarr Tambadou. « Ce que nous devons absolument éviter, c’est de décourager les gens de venir dire la vérité » devant cette commission chargée de faire la lumière sur les crimes commis pendant les 22 ans du régime de Yahya Jammeh », a déclaré le ministre, en précisant qu’il ne s’agissait pas d’une amnistie.
Lors de la précédente audition fin juillet, les trois ex « jugnlers », ont reconnu avoir notamment assassiné le journaliste Deyda Hydara, correspondant de l’AFP, plus de 50 migrants ouest-africains échoués sur une plage, ainsi que d’anciens compagnons de route du président soupçonnés de vouloir le renverser. « Je ne me sens pas respectée par mon gouvernement, qui libère les hommes qui viennent de confesser avoir sauvagement tué mon fils« , a déclaré Ya Mamie Cessay, la mère d’un des deux hommes d’affaires américano-gambiens tués et décapités en 2013, citée par l’ONG Human Rights Watch (HRW).
Arrivé au pouvoir par un putsch sans effusion de sang en juillet 1994 dans ce petit pays anglophone d’Afrique de l’Ouest, Yahya Jammeh s’était fait élire en 1996 puis réélire sans interruption jusqu’à sa défaite en décembre 2016 face à l’opposant Adama Barrow. Les défenseurs des droits de l’Homme ont accusé son régime de tortures systématiques d’opposants et de journalistes, d’exécutions extra-judiciaires, de détentions arbitraires, de disparitions forcées et de viols.
Yahya Jammeh a fini par quitter le pays et a trouvé refuge en Guinée équatoriale en janvier 2017 à la suite d’une intervention militaire et diplomatique régionale.
Le président Adama Barrow avait indiqué, début 2018, qu’il attendrait la fin des travaux de la Commission, qui n’a pas le droit de prononcer des condamnations, pour se prononcer sur une éventuelle demande d’extradition de son prédécesseur.