« Nous n’avons pas eu de débats, nous avons eu de la violence verbale, des tensions, mais pas de vrai débat », c’est ainsi qu’Omar Dehbi a choisi de commencer sa chronique sur les ondes de Medi1 radio, autour des derniers rebondissements de l’affaire Hajar Raissouni, graciée par le Roi, ainsi que tous ses coaccusés.
L’affaire de Hajar Raissouni a dévoilé l’opportunisme de beaucoup de parties qui n’ont pas hésité à surfer sur cette vague pour tenter vainement de redorer leur image et leur blason. Dans sa chronique, Mehdi Dehbi se livre à plusieurs constats, dont le premier est « l’exhibition pathétique de la pensée de certains partis conservateurs et islamistes qui changent de valeurs comme ils changent de vestes ». Rappelons-nous d’Abdel-Ilah Benkirane, l’un des plus farouches opposants au droit de disposer de son corps, qui a crié sur tous les toits sa solidarité avec Hajar Raissouni, et qui a promis d’assister à son mariage. Aurait-il été interrogé sur son avis à propos d’une citoyenne lambda impliquée dans une affaire d’avortement et de relations sexuelles hors-mariage, qu’il aurait brandi un discours discriminatoire sur des bases religieuses sans se faire prier deux fois.
A l’autre bout du diamètre, « des voies modernistes qui avaient du mal à se faire entendre » ont également surgit dans cette affaire. En rire ou en pleurer ? Telle est la question. Des voix « fragiles et embarrassées », qui auraient pourtant pu jouer un rôle crucial si elles n’avaient été entachées par « l’opportunisme de certains activistes sans foi ni loi, habitués tel des rapaces à sauter sur la première occasion qui leur permettrait de dénigrer leur pays et de nuire à leur image » selon les mots d’Omar Dehbi. Beaucoup ont vu dans l’affaire de Hajar Raissouni l’opportunité de créer du buzz nuisible au Maroc. Peut-être que certains y ont-ils vu une manière, drastique certes, de relancer le débat sur les libertés personnelles, mais d’autres ont réellement saisi l’occasion comme une voie de dénigrer l’image du Maroc, un type d’opportunités qui ne se présente pas souvent et dans lequel ils se sont engouffrés. Dans le premier cas, il aurait été illogique de créer des résultats positifs avec des moyens aussi peu catholiques, dans le deuxième, c’est peine perdue puisque le Maroc n’a jamais été un pays fermé à la réactualisation, et ça, même les plus mesquins de ses détracteurs le savent.
Dans le cas de Hajar Raissouni, que l’on aime cette idée ou non, la loi n’a fait qu’être appliquée, et comme le souligne Omar Dehbi dans sa chronique, il est inconcevable de tenir un discours contradictoire : « revendiquer l’Etat de droit, et demander que les les lois ne soient pas appliquées ». Mais une grâce royale, hors occasion de fête nationale ou religieuse, est un fait exceptionnel. Le Chef d’Etat marocain n’a jamais hésité à trancher dans certains cas qui le nécessitent et en tout respect des principes de la démocratie, il laisse le débat et la révision de certaines dispositions juridiques, qui prévoient des peines de prison pour certains cas d’avortement et de relations sexuelles hors-mariage, aux départements de l’exécutif et du législatif concernés. Et c’est là où réside notre grand dam, avec notre classe politique et du gouvernent dénués d’audace politique, malgré le fait que Souverain a, à plusieurs reprises, appelé les responsables à faire preuve de « créativité » et à agir pour que le pays avance, selon leurs prérogatives constitutionnelles.
« Nous avons aujourd’hui tous les mécanismes institutionnels pour que les représentants puissent agir pour réformer et faire évoluer les textes de lois », affirme Omar Dehbi. Le principe est en réalité simple mais interprété de manière tordue. Pour les islamistes, relancer ce débat est l’équivalent de « propageons l’obscénité dans le monde », alors qu’en réalité, il s’agit simplement de demander au judiciaire de se défaire de l’intimité du citoyen consentant, majeur et vacciné, ce qui ouvrira encore plus d’horizons prometteuses, comme la criminalisation effective du viol, qui n’est encore considéré que comme un délit. Il en est à espérer qu’ainsi, la grâce royale envers Hajar Raissouni et ses coaccusés fasse l’objet de jurisprudence, puisqu’il s’agit d’un geste royal fort et significatif, et que le moins que l’on peut y voir est une directive pour les politiciens. Mais la question qui demeure jusqu’à présent, comme le dit Omar Dehbi, est : les politiciens, les acteurs de la société civile, les intellectuels et tous les partenaires du projet social marocain sont-ils prêts à s’impliquer dans une vraie dynamique de développement social, qui va au-delà des petits calculs individualistes ou sectaires ?