Les Algériens sont appelés aux urnes le 1ᵉʳ novembre pour voter sur le projet de nouvelle constitution voulue par le président Abdelmadjid Tebboune. Un sondage organisé sur fond de répression politique des militants du Hirak, le mouvement populaire qui a mis fin à la présence d’Abdelaziz Bouteflika à la tête du pays.
Le 8 octobre, l’un des opposants au régime, un militant laïc, a été condamné à dix ans de prison et à une amende de 66 000 euros pour «incitation à l’athéisme» et «insulte à l’islam». Cette condamnation pour motifs religieux est la plus lourde prononcée à ce jour contre un militant du Hirak. Cet homme d’une cinquantaine d’années arrêté le 30 septembre à son domicile a fait appel.
La police algérienne aurait trouvé chez lui un Coran qui appartenait au grand-père du militant. Un livre dont l’une des pages a été déchirée en raison de l’âge de l’exemplaire. Mais c’est la «preuve» qui a caractérisé «le délit ou le dénigrement du dogme ou des préceptes de l’islam» pour la justice algérienne. Et ce n’est pas la première fois que des condamnations pour raisons religieuses sont prononcées en Algérie Au printemps dernier, par exemple, un autre opposant politique a été condamné à un an de prison, notamment pour «offense à l’islam». Elle a depuis été mise en liberté provisoire.
De nombreux pays jugent et condamnent régulièrement leurs citoyens ou étrangers pour des raisons liées à l’islam. Mais en Algérie, même si l’islam est la religion d’État, l’histoire du pays a longtemps été imprégnée d’une forme de laïcité. Il ne reste aujourd’hui que du côté des opposants réunis au sein du Pacte de l’Alternative démocratique, et là encore, des fractures sont apparues au sein de ce mouvement, précisément sur la question de les libertés publiques et religieuses.
Dans le débat, les partis laïques sont audibles, mais pas dans la campagne puisque seuls les partis qui appellent aux votes sont autorisés à faire campagne. Les partisans de la laïcité ont décidé de boycotter le référendum. Le paradoxe est que les islamistes (proches des Frères musulmans) qui les appellent à voter non le 1ᵉʳ novembre dénoncent un projet de constitution trop laïque à leur goût. Ils critiquent, par exemple, un article selon lequel «L’État protège les femmes contre toutes les formes de violence en tous lieux».
Les islamistes y voient un risque de «menacer la sphère familiale privée». Jusqu’à présent, le référendum du 1ᵉʳ novembre a surtout suscité l’indifférence de la rue algérienne. Une plate-forme de partis et d’associations liés au Hirak, regroupés au sein du Pacte pour l’alternative démocratique (PAD), a rejeté le projet. Le PAD dit que la satisfaction des revendications «légitimes» du peuple passe par la mise en place d’«institutions de transition», dont une nouvelle Constitution, et non une révision de celle héritée des deux décennies de règne de M. Bouteflika. «La crise de légitimité qui frappe le régime depuis l’indépendance ne peut être réglée par des mesures de replâtrage», dénonce le PAD.