Un traité de paix jordano-israélien autorisait la «mise à disposition gratuite» de terres des régions de Baqoura et Ghoumar à des Israéliens, de 1994 à aujourd’hui.
Des Israéliens n’ont pas pu accéder, dimanche 10 novembre, aux terres agricoles que la Jordanie leur avait prêtées pendant le dernier quart de siècle, trouvant parfois les portails cadenassés. En effet, les annexes du traité de paix jordano-israélien de 1994, qui autorisaient la «mise à disposition gratuite» de terres dans les régions de Baqoura (en arabe, Naharayim en hébreu) et Ghoumar (appelé Tsofar en hébreu) à des propriétaires privés israéliens pour une période initiale de vingt-cinq ans, sont arrivées à échéance dimanche.
« Je proclame la fin de la validité des annexes de l’accord de paix (…) et le rétablissement de notre souveraineté totale sur ces territoires», a déclaré le roi Abdallah II de Jordanie devant le Parlement, à Amman. En Israël, le ministère des affaires étrangères a dit «regretter la décision de la Jordanie». Baqoura est une zone de quelque 6 kilomètres carrés située au confluent du Jourdain et du Yarmouk, sur la partie nord de la frontière israélo-jordanienne. Ghoumar est une zone d’environ 4 kilomètres carrés, sur la ligne séparant les deux pays dans le sud.
Dimanche, à Naharayim, deux portails jaunes menant à un ancien barrage et plus loin à un poste-frontière étaient enchaînés et verrouillés, empêchant ainsi l’accès au site désormais sous contrôle jordanien. Selon des responsables locaux, des soldats israéliens étaient venus sur place la veille en fin de journée pour cadenasser l’accès au site, côté israélien. Sur une colline de l’autre côté, des véhicules militaires circulaient et un drapeau jordanien flottait entre deux grandes tentes où doit avoir lieu lundi une cérémonie en présence du chef de la diplomatie jordanienne, Ayman Safadi.
Les agriculteurs de deux kibboutz avoisinants y cultivaient céréales, fruits et légumes. La reprise par la Jordanie de ces terres n’est pas une surprise. En octobre 2018, le roi Abdallah II avait notifié à Israël sa volonté de récupérer ces secteurs frontaliers. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, avait alors répondu vouloir ouvrir des négociations pour maintenir le statu quo, mais aucune entente n’est intervenue pour proroger l’accord, ce qui irrite nombre d’Israéliens sur place.
Pour apaiser les frustrations, les autorités jordaniennes ont précisé dimanche qu’elles allaient autoriser les agriculteurs israéliens à cultiver leurs champs de l’autre côté de la frontière, mais après avoir reçu un visa de l’ambassade de Jordanie à Tel-Aviv. Or cela semble compromis pour l’instant : la Jordanie a rappelé fin octobre son ambassadeur à Tel-Aviv pour protester contre la détention sans inculpation en Israël de deux jeunes Jordaniens, qui ont toutefois été libérés ces derniers jours.