Une affaire de propriété intellectuelle et industrielle secoue le chantier du stade de Tétouan depuis de longs mois. Écarté du projet, un architecte espagnol réclame la reconnaissance de ses droits d’auteur, tandis que son ex-partenaire marocain dénonce une campagne de chantage.
Carlos L. décide de passer à l’attaque. En charge de grands projets en Espagne tels que le Terminal 4 de Barajas, la refonte du Santiago Bernabéu, le complexe flambant neuf de Canalejas ou encore les tours Colomb, cet architecte de renom dénonce depuis un an et demi un collègue marocain, N.B, qu’il accuse d’avoir plagié le corpus du grand stade de Tétouan, un projet d’envergure de 60 millions d’euros. Jusqu’à présent, sa plainte, en attente d’un arbitrage auprès des représentants des deux pays depuis janvier dernier, est encore en traitement.
«Nous nous sommes engagés à cesser de parler de la question au niveau purement médiatique. Nous n’avons reçu aucune réponse depuis dix mois. Nous allons réagir autrement», ont déclaré les représentants de l’architecte espagnol. L’histoire commence quand Carlos L. signe en 2014 un accord avec un confrère marocain : ils participeraient tous deux à un marché de 700 millions de dirhams dont les bénéfices seront répartis à parts égales pour la construction du nouveau Grand Stade de Tétouan. Au moment de la validation du projet, Carlos L. découvre qu’il a été écarté du projet et que son collègue marocain est désormais le seul décideur. Excédé, il affirme que le projet architectural reprend in texto de formules existantes qui lui appartiennent. Il soumet des factures de 230.000 euros à son ex-partenaire, en vain, qui lui aurait proposé comme indemnisation quelque 8.000 euros.
Ce différend, qui jusqu’à présent maintenait un aspect « cordial » et « serein » grâce au rôle joué par les autorités marocaines et espagnoles, risque de prendre une autre tournure. En effet, Carlos L vient d’adresser une lettre au ministre des Affaires étrangères espagnol, Josep Borrell, actuellement en poste, et l’ambassadeur d’Espagne au Maroc, Ricardo Díez-Hochleitner Rodríguez pour réclamer une issue à cette affaire. Dans sa missive, il dénonce également le « manque d’intérêt » des deux autorités pour résoudre un problème signalé depuis plus de 20 mois et demande que le président de l’Association des architectes du Maroc, Azdine Nekmouche, désigné arbitre dans cette affaire, soit écarté.
Initialement, un accord a été proposé à Carlos L, selon lequel il devrait cesser de recourir aux médias pour parler de cette affaire contre une solution expresse à l’amiable. L’architecte espagnol a accepté de consigner par écrit les termes de cet accord à condition qu’une issue soit proposée dans les plus brefs délais. Ce qui n’a pas eu lieu. N.B, lui a réfuté le fait que cette affaire ait été soumise à un quelconque arbitrage. Il décrie une campagne de « diffamation » et de « chantage » de la part de l’architecte espagnol, qui n’aurait contribué que modestement au chantier au stade de Tétouan. N.B,. affirme que les autorités marocaines ont ensuite formulé d’autres demandes d’ordre technique et formel que le bureau d’architecture espagnol n’a pas assumées.
Le conseil supérieur de l’architecture espagnol, assure, par l’intermédiaire de son équipe juridique, l’analyse de la documentation présentée par le studio d’architecture de Carlos L. afin de l’assister, en attendant les résultats de l’arbitrage en cours.