Europapress s’est fendue d’une dépêche qui reprend sans commentaire une intervention de Tebboune. Le président algérien déroule ou plutôt tente d’expliquer laborieusement sa vision de la reconduction du contrat des hydrocarbures avec l’Espagne, sans conditions, à la télévision algérienne. Le procédé n’est pas sans rappeler la publication par le département d’Etat américain de la logorrhée unilatérale de Tebboune lors de la visite d’Antony Blinken à Alger.
Au milieu du brouhaha du régime algérien et des menaces qu’il avait proféré de ne pas reconduire le contrat gazier puis d’augmenter les prix en tant que représailles suite à l’appui franc et acté concernant l’intégrité territoriale du Maroc par le gouvernement Sanchez et suite à la visite du chef de l’exécutif espagnol au Maroc à l’invitation du roi Mohammed VI précédant la mise en oeuvre de la nouvelle feuille de route des relations bilatérales, la reconduction de ce contrat gazier s’est faite comme elle était attendue : c’est-à-dire, sans changements. En effet, la dernière déclaration gouvernementale à ce sujet à été faite, jeudi 7 avril, par Teresa Ribera, ministre de la Transition écologique et troisième vice-présidente du gouvernement, convaincue que l’Algérie respectera ses engagements gaziers avec l’Espagne, suggérant en filigrane que les décisions souveraines du pays ibérique n’étaient pas sujettes à ingérence.
Il faut dire que les hydrocarbures représentent 96% des exportations du pays, près de la moitié de son PIB et 60% des recettes budgétaires de l’ État algérien, selon la Banque mondiale. L’Algérie et les Algériens dépendent entièrement de ces contrats et de l’économie de rente qui continue à empêcher la diversification économique. Partant de là, ces contrats sont nécessaires au pays qui se démène tant bien que mal contre une pénurie continue de produits alimentaires essentiels (dont les pommes de terre, l’huile, le lait, les lentilles …) depuis plusieurs mois.
Constat que le monde connaît en dépit des discours et des gesticulations de Tebboune, dans l’ombre du général Chengriha. Les poings sur les tables qu’il s’agisse du rappel d’ambassadeur algérien à Madrid ou de la critique du gouvernement Sanchez qui n’a fait que respecter la légalité internationale en traduisant clairement son appui au processus politique voté au Conseil de sécurité de l’ONU à travers la résolution 2602 -laquelle consacre le plan d’autonomie du Maroc sur le Sahara – relèvent de la politique politicienne, bien éculée à l’heure des chamboulements géostratégique actuels qui demandent un respect soutenu de la légalité internationale.
Créer un “Etat” non reconnu par l’ONU dans l’Etat (en Algérie) est l’un des événements qui ne peuvent plus passer à l’heure du rééquilibrage d’un monde qui n’est plus binaire ni retranché derrière un rideau de fer opaque ; continuer à vouloir imposer une propagande éculée quand les services de renseignements à l’international ont démontré l’implication des Camps de Tindouf dans l’entraînement et la collusion avec l’EIGS, AQMi et Al Qaeda au Sahel, non plus ; agresser le Maroc à travers une logorrhée sans fin en recevant le secrétaire d’Etat de la première puissance mondiale alors que la publication, quelques jours plus tard, de son rapport sur les droits de l’Homme était sans appel concernant ce sujet et la nature du régime algérien, aurait dû être une leçon également, en plus des certitudes affichées par le pouvoir espagnol sur la légitimité et le réalisme qui ont présidé à sa décision vis-à-vis de l’intégrité territoriale du Maroc de même que sur le partenariat commercial avec l’Algérie.
Alors bien sur, qui regarde la télévision algérienne, si ce ne sont en majorité les Algériens ? Mais ces derniers ont déjà montré leur peu de cas de ce sujet, comme de celui du Sahara, leurs préoccupations politiques et sociales étant celles revendiquées par les centaines de milliers de manifestants du Hirak, dont la fin de la corruption ; la dissolution du FLN ; la mise en place d’une 2e République, l’élection d’une assemblée constituante ; la libération de tous les détenus d’opinion, fin de l’économie de rente …. Point de Sahara ni de pression sur l’Espagne ou autres membres de l’ONU au milieu des préoccupations populaires.
Mais, Tebboune, très disert, au point où l’on se demande s’il compte faire de la propagande une filière des sciences humaines, s’en détourne et déroule un discours ou plutôt une suite de phrases qui se ressemblent tout en attaquant la position souveraine de l’Espagne. Une diatribe, éloignée des préoccupations alimentaires, socio-économiques ou politiques de la population algérienne comme « Nous avons des relations cordiales avec l’Espagne et il y a eu un rapprochement, comme avec l’Italie. C’est le président du gouvernement qui a tout cassé, pas l’Espagne », qui en dit long sur son incapacité à être pragmatique, tout en appréciant la reconduction des accords gaziers à même de lui permettre la continuité de la politique économique de son pays et la stabilité du régime algérien.
Tebboune continue de croire que louvoyer à travers des explications alambiquées lui permet de ne pas perdre la face. Alors que ne pas perdre la face c’est savoir reconnaître ses torts avant que le masque ne tombe, comme l’ont fait quelques démocrates de ce monde, quitte à démissionner de leurs postes. Mais c’est vrai qu’en Algérie on ne démissionne pas, comme l’a prouvée l’histoire récente avec Bouteflika ou plus lointaine, mais toujours douloureuse, des présidents de ce pays.