Pour certains, ce fut un examen à marche hâtive, avec des amendements de l’opposition réduits à la portion congrue ou tout simplement rejetés. Pour d’autres, la mise en œuvre de mesures destinées à assainir les finances publiques et à doper l’économie nationale en 2020.
Les logiques d’évaluation de l’efficacité de la dépense publique dans l’exécution budgétaire ont été abordées, le 12 novembre, dans la Chambre des représentants. La commission des finances et du développement économique a adopté, à la majorité, la première partie du projet entérinée par 24 députés, alors que 13 autres s’y sont opposés. Ce mercredi, les députés seront rassemblés dans le cadre d’une séance plénière à la première chambre, consacrée aux interventions des différents groupes parlementaires à propos du budget 2020. Cette séance sera suivie, demain, d’une intervention du ministre de l’Économie, des finances et de la réforme de l’administration, Mohamed Benchaâboun, avant que la deuxième partie du PLF ne soit soumise à l’approbation.
L’autonomie budgétaire marocaine est marquée par une montée inexorable de la dette publique. Adopté en octobre par le conseil de gouvernement, la politique fiscale de l’année 2020, qui englobe les recettes et les dépenses publiques, ainsi que les stratégies et les instruments destinés à résorber les déficits budgétaires, veut rompre avec la tendance baissière des dépenses d’investissement qui affecte particulièrement les activités sociales et économiques. Elle met en avant l’importance de l’investissement public comme déterminant de la stabilisation macroéconomique de court terme et comme un moyen de restaurer un niveau acceptable de capital public et privé à long terme.
Le budget 2020 prévoit un coup de pouce aux investissements dédiés au secteur public. Il s’élève à 198 milliards de dirhams alors qu’il était de 195 milliards en 2019. 51% de cette enveloppe sera dédié aux entreprises et établissements publics, soit près 101,2 milliards de dirhams, suivis du budget général de l’État, des comptes spéciaux du trésor (CST) et des services de l’État gérés de manière autonome (Segma) avec une part de 39% (77,3 milliards de dirhams), et les collectivités territoriales (10%, soit 19,5 milliards de dirhams).
Le projet de loi de Finances pour 2020 ne tend pas à une réduction à marche forcée du déficit public. En revanche, il organise des mesures directes de soutien au pouvoir d’achat étalées sur plusieurs années et cible un taux de croissance du PIB de 3,7%, le gouvernement s’est fondé, pour élaborer sa feuille budgétaire, sur la probabilité d’une récolte céréalière de 70 millions de quintaux, un cours moyen de pétrole à 67 dollars le baril et un prix moyen du gaz butane à 350 dollars la tonne.
Le texte aborde également la politique budgétaire en matière sociale, surtout les services d’éducation, de santé ou autres, comme la loi-cadre relative à la réforme du système de l’éducation. Les finances publiques du Maroc n’ont cessé de se dégrader sous le gouvernement de coalition dirigé par le Parti de la justice et du développement (PJD). Les dépenses en capital ont perdu du terrain et les dettes ont financé des dépenses qui ne présentent pas un lien manifeste avec des besoins d’intérêt général.
Toutefois, un article a semé la discorde au Parlement. «Les biens et les fonds de l’État ne peuvent faire l’objet de saisie», énonce l’article 9 du PLF 2020 qui suscite des polémiques. «La saisie des biens de l’État a totalisé 10 milliards de DH au cours des trois dernières années, a indiqué le ministre de l’Économie, des finances et de la réforme de l’administration, Mohamed Benchaâboun. Si cette mesure vise à garantir «la continuité du fonctionnement des services publics», affirme ledit responsable, elle est considérée par des acteurs de la société civile comme «anticonstitutionnelle».
Des avocats ont déclaré que «les dispositions de l’article 9 sont très graves, car elles entament la crédibilité de la justice et ses jugements rendus contre l’État et porteront atteinte à l’un des éléments fondamentaux de l’État de droit, et finiront par saper la confiance des citoyens, des justiciables et des avocats dans les décisions et jugements rendus par le pouvoir judiciaire.» Il est à noter que le nombre de dossiers de contentieux contre l’État augmenté de 34% entre 2013 et 2017.