Le 29 novembre 1947, l’ONU a approuvé la résolution 181 qui a mis fin au mandat britannique sur la Palestine et partagé le territoire en deux États, l’un arabe et l’autre juif, la ville de Jérusalem étant placée sous un régime international. Alors qu’Israël a été admis aux Nations unies, la Palestine attend encore.
Le 13 novembre 1974, le chef de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Yasser Arafat, s’est exclamé à la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU : « Aujourd’hui, je suis venu avec un rameau d’olivier et une arme de combattant de la liberté. Ne laissez pas le rameau d’olivier me tomber de la main. »
Quelques jours après le discours historique de Yasser Arafat, l’Assemblée générale a attribué à OLP le statut d’observateur auprès des Nations unies.
Procédure d’adhésion à l’ONU
L’adhésion à l’ONU est « ouverte à tous les États épris de paix » qui acceptent les obligations contenues dans la Charte de cette organisation (article 4 de la Charte). Les demandes sont soumises au Conseil de sécurité, qui, sur la foi du rapport d’un comité, procède à un vote pour déterminer si l’État candidat est effectivement « épris de paix et disposé et capable de s’acquitter des obligations contenues dans la Charte ».
Si la candidature est approuvée par au moins neuf des quinze membres du Conseil de sécurité, sans véto d’un des cinq membres permanents du Conseil, une recommandation favorable est transmise à l’Assemblée générale. Celle-ci vote à son tour et l’adhésion est approuvée si elle est appuyée par une majorité des deux tiers des voix à l’Assemblée générale.
Plan de partage de la Palestine proposé par la Commission spéciale des Nations Unies pour la Palestine. La Palestine est divisée en trois parties : un État juif (en vert), un État arabe (en rouge), la ville de Jérusalem (en blanc) étant placée sous un régime international de tutelle.
En 1988, la Jordanie ayant décidé de rompre tous ses liens juridiques et administratifs avec la Cisjordanie, le Conseil national palestinien a déclaré l’indépendance de l’État de Palestine, avec pour capitale Jérusalem, conformément à la résolution 181 (1947).
L’Assemblée générale a pris acte de la proclamation de l’État palestinien (résolution 43/177 du 15 décembre 1988) et décidé de remplacer l’appellation « Organisation de libération de la Palestine » par celle de « Palestine » dans l’organisation des Nations unies.
De 1991 à 1993, à l’issue de la Conférence de la paix sur le Moyen-Orient qui s’est tenue à Madrid, mais surtout au terme des pourparlers secrets qui ont eu lieu en Norvège (Oslo Channel), l’OLP a reconnu le droit à l’existence d’Israël et Israël a reconnu l’OLP comme représentant du peuple palestinien.
Dix ans plus tard, le 7 juillet 1998, l’Assemblée générale a adopté la résolution 52/250 aux termes de laquelle elle a décidé d’élargir les droits et privilèges de la Palestine au sein des Nations Unies.
En 2002, une «Feuille de route axée sur les résultats sur la voie d’une solution permanente de deux États au conflit israélo-palestinien » a été adoptée par le Quatuor (ONU, Union européenne, États-Unis et Fédération de Russie) à Madrid. Présentée aux parties le 30 avril 2003, la Feuille de route est un plan en trois volets dont l’objectif est de parvenir à un règlement complet et définitif du conflit israélo-palestinien, aboutissant ainsi à l’existence de deux États vivant côte à côte dans la paix et la sécurité :
« Un règlement, négocié entre les parties, aboutira à la création d’un État palestinien indépendant, démocratique et viable vivant aux côtés d’Israël et des autres pays limitrophes en paix et en sécurité. Il réglera le conflit israélo-palestinien et mettra fin à l’occupation qui a commencé en 1967, en tenant compte des fondements de la conférence de Madrid, du principe de l’échange de territoires contre la paix, des résolutions 242, 338 et 1397 du Conseil de sécurité de l’ONU, … et de la proposition du roi saoudien Abdallah, approuvée par la Ligue arabe … qui prévoit l’acceptation d’Israël en tant que pays voisin vivant en paix et en sécurité, dans le contexte d’un règlement général ». |
À noter deux points fondamentaux, a priori inconciliables : La création de l’État palestinien doit résulter d’une négociation entre les parties et cet Etat doit être viable.
En 2011, la Palestine a été admise comme membre de l’UNESCO et, en 2012, l’Assemblée générale a accordé à la Palestine le statut d’État non membre observateur auprès de l’ONU. L’étape suivante doit logiquement être l’admission en tant qu’Etat membre à part entière.
Cependant, le veto américain du 18 avril 2024 s’est dressé sur la voie de cette admission.
Aussitôt, l’Assemblée générale a voté à une écrasante majorité une résolution recommandant au conseil de sécurité de « réexaminer favorablement » la question de l’admission de l’État de Palestine à l’ONU en tant que membre de plein droit. 143 des 193 pays membres de l’organisation ont estimé, contrairement à ce qu’affirment Israël et l’administration américaine, que la Palestine répondait aux critères définis par la charte pour adhérer à l’ONU. Seuls neuf pays, dont les Etats-Unis et Israël, ont voté contre, et vingt-cinq pays se sont abstenus.
Les États-Unis ont justifié leur veto en invoquant leur argument habituel, qui est dûment consigné dans la « Feuille de route » du Quatuor : la création de l’État palestinien doit être le résultat d’une négociation directe entre Palestiniens et Israéliens. D’autre part, ils estiment, avec Israël et leurs alliés, que la Palestine n’a pas démontré qu’elle était véritablement « pacifique » et « disposée et capable d’accepter les obligations de la Charte des Nations unies ». A ce sujet, l’ambassadeur palestinien leur a retourné la question : Israël, pourtant membre de l’ONU, est-il un modèle d’Etat pacifique ? Les Palestiniens accusent Israël de tout faire pour s’opposer à un État palestinien et à la solution des deux États.
Etrangement, alors qu’une admission de la Palestine à l‘ONU est subordonnée au bon vouloir de Washington, les diplomates américains font remarquer que les Etats-Unis ont l’obligation légale de couper leur financement à l’ONU en cas d’adhésion de la Palestine sans l’accord d’Israël.
Plusieurs délégués ont affirmé dans leur explication de vote l’appui de leur pays à l’adhésion de l’Etat palestinien, en précisant que leur vote positif ne signifie pas la reconnaissance de cet État. Quelques-uns ont tenu à faire la distinction entre « les groupes extrémistes » et le peuple palestinien, tandis que d’autres, comme le représentant de l’Australie, ont été plus précis, estimant que le Hamas « n’a pas sa place dans un État palestinien ».
Le soutien massif dont a bénéficié la résolution de l’Assemblée générale est un pas dans la bonne direction et un message clair à la fois à Israël et aux Etats-Unis. La communauté internationale s’est clairement prononcée en faveur de l’admission de l’Etat de Palestine à l’ONU et Washington devra reconsidérer sa position. Les tensions qui marquent à l’heure actuelle la « relation spéciale » entre les Etats-Unis et Israël, même s’il faut se garder d’un optimisme excessif, pourraient augurer d’un changement dans le soutien américain inconditionnel à l’allié israélien. Le journal Le Monde, citant une enquête de Gallup, a écrit qu’ « entre 2013 et 2022, parmi les démocrates, le pourcentage de ceux qui sympathisent davantage avec la cause palestinienne est passé de 19 % à 49 %, dépassant nettement celui de ceux qui continuent à préférer Israël ».
Seulement, les élections américaines sont proches et si, comme tout le donne à penser, Donald Trump est réélu, il est à craindre que le soutien américain à Tel Aviv ne se renforce davantage, en particulier si, d’ici là, un nouveau Premier ministre remplace Netanyahu, contre lequel la Cour pénale internationale vient d’émettre un mandat d’arrêt international pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.