Le président syrien Bachar al-Assad, qui selon une ONG a pris la fuite dimanche 8 décembre, a pendant près d’un quart de siècle dirigé la Syrie d’une main de fer, réprimant une rébellion qui s’est muée en guerre civile, l’une des plus brutales de ces dernières décennies. Il était longtemps soutenu par le régime algérien, militaire et martial comme le pouvoir fondé le père, Hafed, un an après l’indépendance de l’Algérie en 1963.
En 2011, Al-Assad, qui comptait sur l’Algérie parmi ses rares alliés arabes, laquelle défendait bec et ongles sa réintégration au sein de la Ligue arabe, est confronté à la révolte dans son propre pays, une série de manifestations prodémocratie rapidement réprimées dans le sang et qui dégénèrent en guerre civile impliquant notamment diverses forces djihadistes, dont l’organisation État islamique.
Il réussit à se maintenir au pouvoir avec le soutien massif de la Russie, de l’Iran et du Hezbollah libanais. Issu d’une lignée alaouite, il se présente comme le protecteur des minorités syriennes et seul rempart contre l’extrémisme et le chaos.
Soignant son apparence, le dirigeant préfère à l’habit militaire les costumes bien coupés et une cravate sobre. Mais sous une apparence posée et presque timide il démontre une volonté de conserver le pouvoir à tout prix.
Né le 11 septembre 1965, Bachar n’est pas destiné à devenir président mais sa vie change radicalement quand son frère aîné Bassel, qui devait succéder à son père, se tue dans un accident de la route en 1994. Il doit alors abandonner ses études à Londres, où il a rencontré son épouse Asma, une Syro-Britannique de confession sunnite avec qui il aura trois enfants.
Quand il prête serment à l’âge de 34 ans, il incarne pour de nombreux Syriens en quête de plus de libertés l’image d’un réformateur, en mesure de mettre fin à des années de répression et d’instaurer une économie plus libérale dans ce pays au contrôle étatique étouffant. Au début de sa présidence, Assad apparait en public au volant de sa voiture ou dînant au restaurant en tête-à-tête avec sa femme. Il assouplit certaines des restrictions imposées par son père.
Mais l’image du réformateur se dissipe très vite, avec l’arrestation et l’emprisonnement d’intellectuels, d’enseignants ou d’autres adhérents au mouvement de réforme, au terme d’un bref « Printemps de Damas ». Quand le Printemps arabe gagne la Syrie en mars 2011, des manifestations pacifiques appellent au changement. M. Assad, qui est également le commandant des armées, mène alors une répression brutale suivie rapidement par une guerre civile. Pendant la guerre, qui a fait plus de 500 000 morts et a provoqué le déplacement de la moitié de la population, Assad est toujours resté ferme sur ses positions.
Sur le plan interne, grâce à sa « persévérance et sa rigueur », il a réussi à « monopoliser les pouvoirs décisionnels et à garantir le soutien total de l’armée », explique un chercheur à Damas.
Même au pic de la guerre civile, il est resté imperturbable, convaincu de sa capacité à écraser une rébellion qu’il a dénoncée comme étant « terroriste » et le produit d' »un complot » ourdi par des pays ennemis pour le renverser. Abandonné par ses alliés russe et iranien eux-mêmes très affaiblis, il a toutefois dû selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) fuir le pays dimanche, onze jours après le lancement le 27 novembre d’une offensive éclair par les rebelles, à laquelle ses forces n’ont opposé quasiment aucune résistance.
Parmi les symboles les plus forts de la chute de Damas figure la libération de la sinistre prison de Sednaya, où furent emprisonnés, torturés et assassinés des milliers d’opposants aux pouvoir de la dynastie al-Assad.