Dans l’épisode de ce jour de la capsule « dirha gha zwina » [NDLR : tout finit par se savoir], Badria Attalah montre, à travers des exemples concrets d’anciennes personnalités marocaines, que l’amour excessif du pouvoir conduit à la folie.
Beaucoup de gens sont obnubilés par le Makhzen, l’accession aux hauts postes de responsabilité et l’autorité. Seulement, prévient Badria Atallah, il ne faut pas oublier que chaque jour vécu dans une haute fonction est une journée en moins dans la carrière d’une personne à ce poste. A l’image du principe de la vie. Dès qu’on nait on se rapproche chaque jour un peu plus de la mort.
Le pouvoir fascine, le Makhzen aussi ; beaucoup sont prêts à tout pour l’approcher. Parmi ceux qui y arrivent certains veulent y rester contre vents et marées. Et il y a aussi ceux qui, raison n’ont pas su garder, quand ils en ont été éjectés. Abdel ilah Benkiran en est un exemple. Surfant sur la vague du 20 février, il a oublié qu’une vague, par essence, s’échoue sur le rivage. Arrivé au pouvoir, il a brillé par des paroles et des histoires à n’en plus finir comme celles des crocodiles et des démons. Cela lui a plutôt bien réussi puisque depuis il bénéficie d’une retraite dorée de 7 millions et d’avantages qui dépassent 11 millions.
Il est bien loin le temps où il soutenait ne pas avoir les moyens de faire des réparations dans sa cuisine et des aménagements dans une des chambres de sa maison. Révolue aussi l’époque où il haranguait, au sein du Parlement , députés et ministres en donnant comme exemple Omar ibn Khattab, un des compagnons du prophète, qui ne s’autorisait pas à se sustenter tant que les pauvres n’étaient pas rassasiés…
Benkiran a, en effet, bien abreuvé la population de paroles.
Nul doute que le pouvoir transfigure et rend fou certains.
Aujourd’hui, il pleure le passé. Il produit des lives sur les réseaux sociaux à foison sur la période où il était chef de gouvernement et qu’il voyageait ici et là, avec force détails comme en Turquie pays à l’offre hôtelière fastueuse, dont on peut questionner la pertinence ou l’intérêt pour le public.
Notre histoire récente, nous a affublé d’un autre fou de la démesure : Ilyas el Omari. Celui-ci a tellement prétendu détenir le pouvoir qu’il a fini par y croire lui-même dur comme fer. La folle passion qu’il avait pour le pouvoir, le portait à affirmer « détenir le code du Makhzen ».
Ceux qui osaient s’élever contre lui en payaient les frais. Pour la petite (et triste) histoire, il soufflait le chaud et le froid et profitait de son pouvoir d’antan et de la faiblesse de certains ministres, pour en faire ses factotums qu’il envoyait acheter personnellement ses cigarettes.
Un Hubris dans toute sa splendeur …que sa nemesis a fait disparaître comme par enchantement.
Aujourd’hui, muni d’un bâton de pèlerin, il passe son temps entre l’Angleterre, la France et l’Espagne. Plus fou que jamais, il fait croire à qui veut bien l’entendre qu’il a toujours ses entrées « là-bas », d’un petit air entendu. Le syndrome d’Hubris le porte à se rêver en Samson : durant un séjour en Turquie, il s’est fait implanter cheveux et barbe au moment où les ministres barbus du PJD ont coupé la leur.
La vie n’est -elle pas pleine de contradictions ? Certains font pousser leur barbe quand d’autres la taillent.
Ilyas el Omari, Hamid Chabat, et même Abdellatif Ouahbi sont tous fait de la même étoffe : leur fonds de commerce est le populisme et les prédictions de l’avenir à la manière des cartomanciennes. Chabat, poussé par des vents favorables s‘est retrouvé à Fès raflant tout sur son passage dont la mairie de la ville. Mais quand son parti de l’Istiqlal lui a retiré la direction et que le syndicat qui y est affilié l’a balayé d’un revers de la main, il a continué à prétendre être indéboulonnable, refusant de partir. Et pourtant, il a eu le même sort qu’Ilyas : pauvre hère sans parti, sans syndicat et sans ville à présider. Lui aussi erre entre trois pays : Allemagne, Turquie et Belgique.
Un autre Hubris de notre histoire contemporaine s’est lui aussi laissé pousser la barbe : Fouad Abdelmoumni. Dans sa jeunesse, il était opposant, puis a changé de veste. Bénéficiant d’un salaire mensuel de plus de six millions auxquels s’ajoutent de nombreux privilèges, il a fait main basse sur l’argent des micro-crédits et d’avantages en voyages, hôtels et marchés.
Se reconvertissant en conseiller de Tazi, l’expérience a tourné court, n’ayant pas donné satisfaction. N’ayant pas supporté l’issue de cette collaboration, il a tenté d’endosser de nouveau l’habit de l’opposant … sur facebook. Oubliant les règles du jeu et se retrouvant isolé, il a innové en s’opposant au peuple. Faire de l‘opposition contre le peuple, du jamais vu. Le syndrome d’Hubris l’a vertigineusement conduit à concevoir ce qui ne se peut.
Dans la même veine, on peut évoquer Maati Moujib et Abubakr Jamai.
Ce dernier répète inlassablement depuis 20 ans la même rengaine : révolution, entourage royal, makhzen, Intifada …en bon déçu de ne pas avoir été sélectionné pour intégrer le cabinet royal et mécontent d’avoir été démasqué puisque jugé sans valeur ajoutée. Vanitas vanitatum … mégalomanie quand tu nous tiens, une mécanique mentale se met en place et bloque toute évaluation de soi à sa juste valeur.
La morale des histoires que nous a contées Baria Atallah aujourd’hui est la suivante : ne pas savoir se contenter de ce qu’on est ou de ce qu’on a, se laisser guider par un excès d’orgueil conduit au syndrome d’Hubris.






