Le gouvernement espagnol a annoncé mettre en place une politique migratoire ambitieuse et mesurée, destinée à répondre aux besoins urgents de main-d’œuvre tout en assurant des flux migratoires «légaux, sûrs et ordonnés.» Cette initiative aspire à régulariser près de 900 000 migrants au cours des trois prochaines années, en particulier ceux en provenance du Maroc, avec une procédure progressive d’intégration et de régularisation des travailleurs déjà installés sur le sol espagnol.
Face à une arrivée incessante de migrants, notamment par mer, dans l’archipel des Canaries où les infrastructures d’accueil sont saturées, l’Espagne a décidé de prévenir les drames liés aux traversées dangereuses et d’offrir des alternatives viables aux jeunes migrants, souvent exploités par les réseaux criminels. Pilar Cancela, secrétaire d’État aux migrations, a souligné que l’Espagne ne cherche pas à ouvrir ses frontières de manière incontrôlée mais à mettre en place une politique migratoire fondée sur l’inclusion et l’intégration progressive.
Le gouvernement espagnol prépare également un nouveau règlement sur les permis de séjour, qui simplifiera les démarches administratives et clarifiera les règles d’intégration, en particulier pour les questions de formation, d’homologation de diplômes et d’accès à l’emploi durant les études. Ce dispositif est toutefois conditionné : les migrants devront démontrer leur «arraigo», c’est-à-dire leur enracinement en Espagne en prouvant qu’ils résident sur le territoire depuis au moins deux ans et qu’ils sont intégrés, que ce soit par le biais de l’emploi, de la famille ou de l’éducation.
Le Maroc au cœur de la stratégie migratoire espagnole
Le Maroc, en tant que principal partenaire migratoire de l’Espagne, joue un rôle clé dans cette politique. Les migrants marocains, qui représentent une part importante des arrivées, bénéficieront de cette nouvelle approche, vouée à encadrer leur intégration de manière plus souple et plus humaine. Les accords bilatéraux entre Madrid et Rabat prévoient une gestion des flux migratoires qui va au-delà du simple contrôle des frontières, en proposant des solutions concrètes pour la formation professionnelle et l’emploi dans des secteurs comme l’agriculture et la construction.
Pilar Cancela insiste sur le fait que cette régularisation ne constitue pas un programme de masse, mais bien une démarche individualisée. «Chaque situation sera examinée au cas par cas, en fonction des circonstances propres à chaque migrant», précise-t-elle. L’objectif est de sortir progressivement les travailleurs migrants de l’illégalité et de leur offrir des perspectives durables d’intégration.
Répondre aux besoins démographiques de l’Espagne
Confrontée à un vieillissement démographique et à une pénurie croissante de main-d’œuvre, l’Espagne considère la migration comme un levier crucial pour son développement économique. Les secteurs de l’hôtellerie, du bâtiment et des transports, entre autres, dépendent de l’arrivée régulière de travailleurs étrangers, notamment dans un contexte où les départs en retraite sont nombreux. Les experts estiment que l’Espagne devra accueillir environ 200 000 immigrés chaque année jusqu’en 2050 pour maintenir sa dynamique économique et soutenir son système de sécurité sociale.
Dans cette perspective, Pedro Sánchez a réaffirmé l’importance de la contribution des migrants à l’économie espagnole, les qualifiant de «facteurs essentiels de richesse, de progrès et de prospérité» pour le pays. Cette politique volontariste vise non seulement à combler les besoins immédiats en main-d’œuvre, mais aussi à inscrire l’Espagne dans une démarche à long terme de croissance inclusive et de développement social.