Le mécontentement et l’exaspération animent la rue mauritanienne ; exprimés jusqu’alors dans la sphère privée, ils se dévoilent. Selon des sources médiatiques, des manifestations de la jeunesse prendront place chaque vendredi en Mauritanie. Elles sont indissociables au retour au pays de l’ancien Mohamed Ould Abdelaziz, qui s’était volatilisé après la dernière présidentielle, accusé de corruption, mais aussi à l’inégalité et à l’exclusion qui règnent au pays. Les difficultés économiques et le malaise social alimentent la frustration et la colère.
La dégradation des conditions socio-économiques en Mauritanie a abouti à des contestations périodiques, dénonçant la contamination du système juridique et politique mauritaniens par le clientélisme et la corruption. C’est la jeunesse qui reprend le flambeau de la contestation, en annonçant investir les rues dès aujourd’hui et ce chaque vendredi jusqu’à l’arrestation de l’ancien président.
En effet, Mohamed Ould Ghazouani, le nouveau maître des lieux en Mauritanie, a été appelé par des courants de l’opposition à arrêter l’ancien président et son clan, soupçonnés d’avoir «alimenté la corruption et contribué à sa généralisation» et d’instaurer une «gestion néopatrimoniale de l’État, où les détenteurs du pouvoir confondent les biens communs avec leurs biens propres», et de faire perpétuer un «système de redistribution clientéliste.»
Très impopulaire auprès d’une opinion publique lassée des malversations, Ould Abdelaziz, que l’opposition accuse d’avoir perpétué la mainmise sur les biens de l’État, à son profit et à celui de ses proches, a tenu un meeting dans les locaux de son parti, l’Union pour la République (UPR), en marge de son retour au pays, le 17 novembre. Ancien général de l’armée mauritanienne, ex-chef d’état-major particulier, Ould Abdelaziz a mené la transition qui a suivi le putsch contre le président Mohamed Ould Cheikh Abdallahi (2007-2008) au rythme de son agenda personnel.
Toutefois, ses efforts ont débouché sur une alternance inaboutie avec un pouvoir composite où les réseaux clientélistes sont restés très prégnants. S’il a pris des mesures qui renforcent le sens du changement (retour des réfugiés expulsés, vote de lois pénalisant la pratique de l’esclavage, etc.), le pouvoir qu’il a mené a été contaminé par les affaires en relation avec les fonds publics, par la fragmentation de ses centres de décisions, et le poids présumé des militaires.
Mohamed Ould Abdelaziz, que l’opposition réclame de juger, est accusé d’avoir entretenu durant ses deux mandats la confusion entre public et privé, d’avoir multiplié les occasions de favoritisme, de népotisme et de prévarication dans le cadre d’un système clanique qui se réclame garant de la stabilité politique.