L’artiste nigérian Seun Kuti invité au festival Jazzablanca entend soi-disant porter le deuil après le décès de 23 migrants tentant de rejoindre la cité de Melilla au Maroc. Quant au Colombien Maluma, il a annulé son concert sans crier gare. Pourtant, les deux artistes sont issus de deux pays qui ont connu ces dernières semaines des événements sanglants ayant engendré des centaines de morts.
L’artiste nigérian Seun Kuti a annoncé jeudi l’annulation de son concert qui était prévu samedi au festival marocain Jazzablanca, afin de «porter le deuil» des 23 migrants ayant péri en tentant de rallier l’enclave espagnole de Melilla au Maroc. «C’est avec une grande tristesse que je vous annonce l’annulation de notre voyage au Maroc ce weekend pour Jazzablanca», a indiqué Seun Kuti, fils du précurseur de l’Afrobeat Fela Kuti, dans une vidéo postée sur son compte Instagram.
Une réaction assez étrange, alors que l’artiste, par exemple, n’a pas «porté le deuil» des victimes massacrées durant la messe de la Pentecôte début juin, ayant fait 22 morts et 58 blessés, dans le sud-ouest du Nigeria, ni celles tuées, le 22 mai, dans le nord-est du Nigeria dans une attaque menée par des djihadistes, ni celles ayant péri dans l’explosion dans une raffinerie de pétrole illégal, qui a fait au moins cent dix morts dans le sud du Nigeria. L’énumération est longue, mais la vilenie morale est la même.
Les organisateurs du Jazzablanca, prévu du 1ᵉʳ au 3 juillet à Casablanca, ont confirmé l’annulation du concert de Seun Kuti à l’AFP. «C’est une décision personnelle de l’artiste», ont-ils commenté.
Maluma, l’artiste colombien a, lui aussi, annulé son concert après une story énigmatique sur Instagram. Pourtant, il s’est montré peu soucieux du sort des quatre personnes mortes et des plus de 300 autres gravement blessées dans l’effondrement des gradins d’une arène, le 26 juin. Aucune réaction de sa part quand l’armée colombienne a commencé le 29 mai à déployer un millier de soldats dans la ville de Cali, où au moins treize personnes ont été tuées la veille à la suite de manifestations anti-gouvernementales.
Maluma a observé un silence coupable alors qu’en un mois de soulèvement populaire dans son pays, au moins plus 60 morts, dont deux policiers, ont été enregistrés dans le pays, selon un décompte officiel. Tandis que certaines ONG dénombrent 2 300 personnes blessées et 123 sont portées disparues.
Ces réactions sélectives font fi de la vérité que 37 migrants ont été inculpés pour «entrée illégale sur le sol marocain», «violence contre agents de la force publique», «attroupement armé» et «refus d’obtempérer», voire encore pour «participation à une bande criminelle en vue d’organiser et faciliter l’immigration clandestine à l’étranger».
Qui portera la souffrance des autorités marocaines dont plus de 120 éléments ont été blessés ? Les migrants morts ont péri «dans des bousculades et en chutant de la clôture de fer» lors d’«un assaut marqué par l’usage de méthodes très violentes de la part des migrants» et non à cause du traitement de la gendarmerie marocaine. Des ambassadeurs africains accrédités au Maroc avaient été reçus par des responsables des ministères des Affaires étrangères et de l’Intérieur à Rabat et ont reçu toutes les clarifications nécessaires sur cet évènement.






