France 2 a diffusé des témoignages de femmes accusant l’ancien ministre Nicolas Hulot de violences sexuelles. Au Maroc, deux affaires récentes d’agression sexuelle ont vu des victimes ciblées par les plus audacieuses diatribes, par des commentaires insultants et des accusations dégradantes.
Au moment où nous mettions en ligne cette article, l’Agence France-Presse a rapporté que «le parquet de Paris n’a pas traîné. Au lendemain de la diffusion d’un reportage de 62 minutes de l’émission Envoyé Spécial de France 2 mettant en cause Nicolas Hulot, une enquête préliminaire pour viol et agression sexuelle a été ouverte vendredi 26 novembre.»
Les investigations ont été confiées à la brigade de protection des mineurs (BPM) de la direction régionale de la police judiciaire (DRPJ). Elles «s’attacheront à déterminer si les faits dénoncés peuvent caractériser une infraction pénale et si, au vu de leur ancienneté, la prescription de l’action publique est acquise», a-t-elle expliqué.
France 2 a diffusé, le 25 novembre, une édition exceptionnelle de son émission fétiche «Envoyé spécial» sur des faits de violences sexuelles mettant en cause une personnalité publique de premier plan, en l’occurence Nicolas Hulot. Des femmes – quatre, dont trois à visage découvert – ont pour la première fois trouvé les mots pour témoigner contre l’ancien ministre de la transition écologique, sur des faits de viol et d’abus sexuels.
Le scandale était si grand que, la veille de la diffusion du programme, M. Hulot a annoncé quitter «définitivement la vie publique, tout simplement parce que je suis écœuré. À partir de maintenant, je vis pour mes amis, pour ma famille. Je quitte mon engagement et je ne m’exprimerai plus. C’est trop lourd payé.» Des propos énoncés au cours d’une longue interview sur BFM-TV, durant laquelle il a annoncé qu’il démissionnait de la présidence d’honneur de la Fondation pour la nature et l’homme, qu’il préside.
Omar Radi – Soulaiman Raissouni – Nicolas Hulot
«Le télescopage des calendriers ne pouvait être plus symbolique», pour reprendre les mots d’un reporter français peu amène l’égard du Maroc. Alors que le procès en appel d’Omar Radi, qui était soupçonné à la fois d’avoir reçu des «financements étrangers», d’«atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat» et de «viol» dans deux affaires instruites conjointement par la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca, se poursuit, l’affaire Nicolas Hulot a accouché de l’affreuse réalité longtemps occultée : toutes les victimes de viol ne sont pas égales.
Omar Radi s’est dit victime d’une «vengeance» du pouvoir, a parlé de «relations librement consenties», alors que sa victime, au fond du gouffre, désespérée, plaidait son «droit à la dignité». Son complice, Imad Stitou, condamné pour «participation au viol», a fui le Maroc le jeudi 25 novembre, une nouvelle qui a provoqué un retentissement inattendu.
Omar Radi, fort d’un soutien en règle offert par quelques ONG, a protesté avec la dernière énergie contre son incarcération en réclamant sa mise en liberté. Il n’a jamais été tenté de convaincre de son innocence, il a seulement harangué contre sa victime, contre la justice, contre le pays.
Bizarrement, les organisations de défense des droits humains, dont Amnesty et Human Rights Watch, qui ont évoqué des «accusations douteuses d’agressions sexuelles» dans le cadre du dossier de Omar Radi, ne se sont pas encore prononcées sur l’affaire Nicolas Hulot. Parlerait-t-on d‘«affaires de mœurs instrumentalisées pour réduire au silence» la voix de Nicolas Hulot ? Évoquerait-t-on «des allégations apparemment truquées» contre Nicolas Hulot ? Mentionnerait-t-on un «dossier monté selon des procédés assez habituels» ?
L’on se souvient l’empressement des cercles proches d’Omar Radi à accueillir les bruits les plus fâcheux sur le compte de sa victime, Hafsa Boutahar, pour discréditer son récit. A-t-on besoin de rappeler les faits ? Il s’agissait de savoir si le premier venu, sans preuves ni commencements de preuves, a le droit d’insulter grossièrement la justice marocaine, et en même temps les institutions publiques, dans les personnes les dirigent.
La presse étrangère, elle, s’occupait beaucoup à livrer des récits partiaux, se complait à entretenir une fausse neutralité, alléguant de nombreuses citations de seconde main sur une affaire d’une complexité infinie. Durant cette affaire, plus d’un témoignage ont été recueillis de l’exécration à laquelle était voué dès ce moment la victime de Omar Radi.
«L’accusation de viol était, elle, plus embarrassante dans le contexte de la vague internationale de #metoo. Chargée de tâches administratives et commerciales au Desk, Hafsa Boutahar affirme avoir été sexuellement agressée, dans la nuit du 12 au 13 juillet 2020, par Omar Radi, au domicile du patron de l’entreprise, qui faisait alors partiellement office de bureau, en raison du Covid-19. Le journaliste conteste cette version, affirmant que leur relation sexuelle avait été «“consensuelle”» avait écrit ledit reporter. C’est tout ? C’est tout.
Human Rights Watch (HRW) publiera certainement un communiqué détaillant les différents volets de l’affaire Hulot où elle dénoncera «les accusations [de viol] et la cascade d’autres charges semblent concoctées pour [le] faire tomber». «L’accusatrice de Omar Radi [dans le dossier du viol], qui s’est exprimée publiquement, a le droit d’être entendue et respectée», avait noté un communiqué de HWR avant quelques mois. Elle n’a été ni entendue, ni respectée.
Une autre mascarade, l’affaire Soulaiman Raissouni. Le procès en appel de cet individu condamné en première instance à cinq ans de prison pour «agression sexuelle», s’est ouvert mercredi 13 octobre à Casablanca. «Son comité de soutien et l’organisation Reporters sans frontières appelant à sa libération» a noté AFP. Aucun mot sur sa victime, terrée dans le marasme moral.
Malgré les pressions judiciaires et les croisades contre le militant LGBT+ (qui a tenté de se mettre fin à ses jours), le dossier a été instruit selon la loi. L’entourage de Raissouni dénonce un procès «à caractère politique et revanchard», sans preuve. Le scandale éclate par la suite lorsque la famille de l’inculpé a prétendu que ce dernier a observé une supposée grève de la faim pendant 122 jours pour protester contre sa détention. Ce qui n’était qu’un simple stratagème pour bouder la plupart des audiences de son procès en première instance.
Les autorités marocaines, elles, affirment que Raissouni a bénéficié d’un procès «équitable» et que les poursuites «n’ont rien à voir avec son travail journalistique».
Nous souhaitons que les plaignantes qui accusent Nicolas Hulot ne deviennent pas qu’un paradoxe de presse et de conversation comme c’était le cas pour Hafsa Boutahar et Adam Mohammed.