La présidence algérienne a annoncé mercredi la mort de trois de ses ressortissants dans un supposé bombardement au Sahara. Alger accuse Rabat d’être coupable de la mort des trois Algériens. Derrière les premières informations sur cet événement, un site douteux qui n’a pour point d’appui que des systèmes préconçus.
Derrière l’incident des camions algériens, un site qui a évoqué les événements à partir de faits très isolés. Témoignages clandestins, spéculations, fades rapsodies, annonces facétieuses, procédés d’amplification, machines pieuses de mise en scène, sources toujours vaguement indiquées, Mena Defense a retenu l’attention. Le second caractère, et celui-ci ne frappe qu’à la longue et après une lecture répétée, c’est l’insignifiance des détails dont il s’occupe. Le site ne reproduit pas ce qu’il y a de véritablement véridique dans ce qu’il s’est passé : il reproduit pour ainsi dire ce qu’il y a de douteux et qui soulève de multiples questions.
Le site écrit : l’incident a eu lieu le 1ᵉʳ novembre 2021 entre 13h et 13h30.
La Minurso déclare, le 5 novembre : l’incident a eu lieu le 2 novembre 2021. Le régime algérien qui réclame les événements se sont produits pour entacher les commémorations du 1ᵉʳ novembre 1954 devra trouver autre chose pour soutenir ses théories.
Bien éloignés de l’assurance des relais du pouvoir algérien, qui poussent hardiment chacun de leur côté les branches de leur récit, sans s’inquiéter de se contredire les uns les autres, les fabricateurs du texte de Mena Defense sont timides. Ils citent leurs autorités, même anonymes.
Si le communiqué algérien ne précise pas l’endroit exact où le bombardement a eu lieu (ce qui interpelle très sérieusement), un autre paramètre est encore plus troublant. Le site spécialisé algérien menadefense.net, géré par Akram Kharief, a indiqué à l’AFP que les camionneurs algériens avaient été «tués à Bir Lahlou au Sahara» dans une zone généralement peu fréquentée par les convois civils. Si les deux camions empruntaient «la route assurant la liaison entre Nouakchott (Mauritanie) et Ouargla (sud de l’Algérie)», que faisaient-ils donc sur le sol marocain ?
«Le Maroc n’a jamais ciblé et ne ciblera jamais des citoyens algériens, quelles que soient les circonstances et les provocations», a assuré une source bien informée à AFP. Une importante déclaration que Menadefense ne reprend pas dans ses articles ultérieurs. De la question de fond, de la question de savoir si les hypothèses proposées étaient réellement la conséquence rigoureuse, l’explication nécessaire, le site susmentionné s’est généralement trop peu soucié et pour cause.
Selon la source marocaine, cette zone est «empruntée exclusivement par des véhicules militaires des milices armées» du Front Polisario. «On s’étonne donc de voir les autorités algériennes évoquer la présence d’un camion qui se trouverait dans cette zone, eu égard à sa nature juridique et à son utilisation à des fins militaires», a-t-elle argumenté. Une autre explication cruciale passée à la trappe par le même site.
Après de premières informations sur cet incident publiées mardi sur les réseaux sociaux, l’armée mauritanienne avait, elle, démenti dans un communiqué qu’une telle attaque se soit produite en territoire mauritanien. Cette information a été ébruitée par la conseillère de Brahim Ghali, Nana Labat Rachid.
Selon le site menadefense.net, «les victimes, trois chauffeurs algériens, conduisaient deux camions affrétés pour transporter du ciment vers la Mauritanie». Une information qu’aucune source indépendante n’a pu vérifier. Le site spécialisé affirme avoir interrogé des proches des victimes ? Comment-a-t-il pu identifier les occupants des camions et prendre langue avec leurs proches très vite ?
Plus étonnant encore, le site menadefense.net avait dans un premier temps affirmé que le bombardement avait été effectué par des tirs d’artillerie de l’armée marocaine, en se fondant sur des témoignages douteux, avant d’évoquer celui d’un drone armé, sans aucun détail crédible étayant cette thèse. La vérité, c’est qu’aucune preuve sur l’utilisation de ces drones n’a été avancée ni par les autorités algériennes, ni par le site lui-même, ce dernier évoquant très vaguement les conclusions de «plusieurs experts en armement» sans les citer. Tout se borne ainsi à broder sur un canevas donné.
Le site, enfin, laisse apercevoir les marques non équivoques d’une maîtrise déficiente du sujet, à travers une conclusion alignant platitude sur platitude : «Si le drone a pu cibler de manière aussi précise les deux véhicules c’est qu’il a très clairement identifié ses cibles qui étaient visiblement civiles (deux camions blancs vides à l’arrêt). Le tir n’a pas pu avoir lieu sans confirmation d’une autorisation de tir et donc sans prise de conscience à un niveau hiérarchique élevé, les pilotes de drones étant des officiers et leur hiérarchie directe étant composée d’officiers supérieurs. Il est donc probable que l’attaque ait été faite de manière délibérée en connaissance ou non de la nationalité des victimes.» Une analyse développée par des rapprochements artificiels. Au lieu d’une véritable description des faits, on a eu droit à un verbiage creux d’une vieille commère, le ton bassement familier d’une littérature de nourrices et de bonnes d’enfants.