Jimmy Carter, 39ᵉ président des États-Unis, est mort le 29 décembre à l’âge de cent ans. Si son mandat (1977-1981) est souvent associé à ses efforts pour la paix et les droits humains, il s’est également illustré par des décisions stratégiques dans le cadre de la guerre froide. Son rôle, quoique tardif, dans le soutien au Maroc pendant la guerre du Sahara, a marqué une étape décisive dans les relations entre Washington et Rabat.
Une inflexion stratégique après 1979
Le mandat de Carter coïncide avec les temps forts du conflit au Sahara, où le Maroc fait face aux infâmes offensives du Front Polisario, soutenu par l’Algérie. Après avoir suspendu temporairement les ventes d’armes au Maroc, insistant sur la nécessité de respecter les clauses limitant leur usage, M. Carter reprend les livraisons à l’égard du royaume chérifien. Cependant, deux événements majeurs survenus en 1979 – la chute du Shah d’Iran et l’invasion soviétique de l’Afghanistan – bouleversent les priorités américaines. Craignant une déstabilisation régionale qui pourrait profiter à l’Union soviétique, Washington décide de renforcer son engagement auprès du roi Hassan II.
En 1980, dernière année de son mandat, Carter autorise une assistance militaire accrue : des équipements stratégiques, des conseillers militaires sur le terrain et des ingénieurs américains sont envoyés pour soutenir l’armée marocaine. Ce tournant permet au Maroc d’écraser les attaques du Polisario et de sécuriser une grande partie du territoire sahraoui.
Les murs défensifs : une décision stratégique incontournable
Parmi les contributions notables des États-Unis figure l’aide à la construction des murs défensifs, élément central de la stratégie marocaine. Inspirés des techniques utilisées par les Français en Indochine et en Algérie ainsi que par les Israéliens dans leur confrontation avec l’Égypte, ces murs ont été bâtis pour contenir les mouvements mobiles du Polisario. Érigés grâce à l’expertise d’ingénieurs américains et au soutien financier des alliés du Maroc, ces fortifications changent la dynamique du conflit. En 1982, le Maroc contrôle 85 % du Sahara, contraignant le Polisario à se retirer dans une bande de terre en dehors des murs défensifs.
Une relation bilatérale consolidée
Bien que son mandat ait été marqué par un souci constant de préserver une image de défenseur des droits humains, M. Carter a su conjuguer pragmatisme stratégique et soutien mesuré au Maroc. Son action a permis de consolider l’alliance maroco-américaine tout en renforçant la position du roi Hassan II sur le plan interne.
Si le soutien américain prend libre allure sous l’administration Reagan, le rôle de Jimmy Carter dans le tournant stratégique de 1980 reste fondamental. Il a jeté les bases d’un partenariat durable entre les deux nations et a permis au Maroc de réfréner les assauts au Polisario. La disparition de Jimmy Carter est l’occasion de rappeler l’importance de son action dans une région où les équilibres géopolitiques, marqués par les luttes idéologiques de la guerre froide, continuent de résonner aujourd’hui. Son rôle dans le soutien au Maroc demeure un épisode majeur de son héritage diplomatique.