L’ONG britannique « The Bureau of Investigative Journalism », vient de révéler que le Pentagone aurait payé plus de 540 millions de dollars entre 2007 et 2011 à l’agence de communication britannique controversée Bell Pottinger pour produire des vidéos de propagande pendant la guerre en Irak.
Certaines de ces vidéos devaient passer pour des vidéos produites par Al-Qaïda. D’autres devaient sembler venir de chaînes de télévision arabes. Ces vidéos auraient été utilisées pour repérer les personnes qui les regardaient et les pister à l’aide de logiciels espions insérés dans les enregistrements.
Lord Tim Bell, ancien président de Bell Pottinger et ex-conseiller en communication de Margaret Thatcher, a confirmé que son agence avait travaillé sur des opérations militaires « secrètes », couvertes par « divers accords de confidentialité ». Tim Bell, qui a démissionné en août dernier pour fonder une nouvelle agence, a affirmé que Bell Pottinger avait rendu des comptes au Pentagone, à la CIA et au Conseil de sécurité national américain.
En 2004, l’agence avait été embauchée pour travailler à la « promotion des élections démocratiques ». Mais les opérations ont ensuite changé de direction.
Trois type d’opérations de communication auraient été organisés en Irak, selon un militaire cité par le Bureau : les « blanches », dont l’auteur était identifié ; les « grises », dont la source n’était pas identifiée ; et les « noires », ou « black ops », à qui on attribuait une fausse source. Ces opérations coûtaient environ 100 millions de dollars par an.
Selon Martin Wells, ancien monteur vidéo chez Bell Pottinger, l’agence livrait trois types de produits : des spots télévisés critiquant Al-Qaïda; des spots d’informations qui devaient avoir l’air d’avoir été produits par des télévisions arabes – et qui étaient ensuite distribués aux chaînes télévisées de la région, et des vidéos de propagande faussement signées Al-Qaïda, et gravées sur des CD que les marines américains laissaient à différents endroits au fils des raids.
Le logiciel espion installé sur les CD aurait ensuite permis de repérer les personnes qui regardaient les vidéos. Les fichiers vidéo auraient requis l’utilisation de RealPlayer, logiciel qui se connectait à Internet et portait un code qui permettait à l’adresse IP de l’utilisateur d’être renvoyée vers un site militaire américain sécurisé.
Selon M. Wells, les cas les plus intéressants étaient ceux où une vidéo était repérée dans un autre pays 48 heures ou une semaine après que le CD ait été déposé, car cela fournissait une piste. Les CD auraient été repérés de cette manière en Syrie, en Iran et aux États-Unis.
L’ancien employé affirme que les productions de l’agence étaient approuvées par le Général David Petraeus, commandant de la coalition en Irak, et parfois par la Maison blanche.
Tim Bell a déclaré ne pas avoir eu connaissance de l’utilisation de logiciels espions dans le cadre de ces opérations, rapporte le Sunday Times, qui a travaillé avec le Bureau sur cette affaire. L’unité qui travaillait sur ces opérations en Irak a été fermée en 2011. Ses membres-clés nient tous l’existence des logiciels espions décrits par Wells, selon le Times.