Lorsque la vengeance prend l’habit de la justice, l’esprit humain s’avilie et ne voit que «juste châtiment» dans des faits, pourtant, gravissimes pour la société.
Le lynchage à mort d’une personne, comme cela est arrivé, le 16 juillet dernier, à un voleur malchanceux dans un souk hebdomadaire à Boumia (Midelt), et la pénible expérience qu’ont vécue deux jeunes filles à Inezgane, prises à partie, mi-juin, par des marchands, pour « port de vêtements indécents », auraient relevé du simple fait divers anodin , n’eut été la réaction salutaire de certaines consciences.
Ces faits regrettables, qui ont alimenté les réseaux sociaux, tout comme la mésaventure d’un jeune homme passé à tabac à Fès, fin juin, pour tenue suggestive renvoyant à des tendances homosexuelles, ont, en effet, mis à jour la montée d’un phénomène inquiétant qui, fort heureusement, à suscité un tollé chez différentes composantes de la société, notamment les activistes des droits de l’homme et les potentialités agissantes de la société civile.
Les pouvoirs publics se sont trouvés eux-mêmes interpellés sur ce phénomène qui empiète manifestement sur un domaine exclusivement de l’apanage de l’Etat: la justice.
C’est ainsi que le ministère de la justice a été prompt, suite au lynchage du voleur surpris en flagrant délit au souk de bétail de Boumia, à annoncer l’ouverture d’une enquête, et promettre que des poursuites seraient engagées contre les auteurs de l’agression.
« La fermeté » sera de rigueur «envers ceux qui essaient de se substituer à la loi », avait averti le ministère dans un communiqué.
L’opinion publique a, elle, été mise en émoi par ces cas répétés de vengeance de la populace contre de supposés méfaits attentatoires aux mœurs.
Ses appréhensions sont justifiées, car il y a un véritable risque de voir proliférer des groupes d’énergumènes, se croyant fondés à régenter les comportements sociaux à leur manière, et obnubilés qu’ils sont par des repères idéologiques étrangers à la société marocaine et aux référents religieux qui lui garantissent un vivre en commun.
Il n’empêche, cependant, que dans toute société librement organisée, le vivre ensemble commande un minimum de code comportemental, fait de convenances et d’usages communément admis, qui fondent le respect mutuel et la préservation de la dignité des uns et des autres .
Autrement, ce serait une régression vers les périodes sombres de l’humanité où la notion d’Etat et ce qui s’y attache comme modes d’organisation, basés sur des idéaux et des valeurs communes, étaient archi-méconnus.






