Les ministres nominés à l’issue du remaniement, et surtout les nouveaux visages font l’objet de grandes attentes. Un changement de méthode de travail est attendu, et l’obligation de résultats pèse sur les prestations du nouveaux gouvernement. Pourtant, les contraintes avec lesquelles ils devront composer sont considérables. Nous en sommes déjà au mi-mandat du PJD, 2019 touche à sa fin, et 2021 approche à grand pas. En tout réalisme, quel pronostic pouvons-nous dresser autour des réalisation éventuelles du nouveau gouvernement ?
Mustapha Sehimi, universitaire et politologue, explique qu’en premier lieu « les nouveaux ministres ont la contrainte de la loi de Finances 2020, à laquelle ils devront se plier, sans y avoir participé », cela veut dire que le 18 octobre prochain, la loi de Finances 2020 sera présentée officiellement et publiquement au parlement, et les nouveaux ministres ne pourront rien y changer. Pour M. Sehimi, « il sera difficile pour un nouveau ministre de donner sa marque à sa politique », de ce fait.
Les ministres seront tenus d’œuvrer selon les directives de modèle de développement annoncé par le Roi lors de son discours de la Fête du Trône. Mais le fait est que le modèle de développement n’a pas encore été élaboré. Nous sommes actuellement dans une phase d’attente, « la Commission n’a pas encore été nommée, chose qui était prévue pour la rentrée. Une fois cette commission mise en place, il faudra lui donner le temps de travailler sur le nouveau de développement. Ainsi, il faut s’attendre au moins à 6 mois de travail pour pouvoir élaborer un modèle de développement national, qui fait office de réflexion stratégique. Dans 6 mois, nous en serons presque à la saison estivale 2020, et ainsi, on peut s’attendre à découvrir le modèle de développement vers septembre 2020″, explique le politologue. Naturellement, ce modèle va définir des priorités, des urgences et des modalités, « lesquelles ne seront pas applicables en 2020, mais à partir de 2021 et au-delà« , ajoute M. Sehimi.
A ce moment, nous en serons déjà à 2021 qui est « une année électorale, qui ne permettra d’engager aucune réforme » vu le calendrier politique. Les campagnes politiques démarrent généralement à partir de janvier de la même année, puis, après les élections, le nouveau gouvernement sera installé aux alentours de septembre. « Ainsi, 2021 est une année d’immobilisme qui vient après une année 2020 de continuité, c’est là où réside une troisième difficulté ».
Sans compter qu’en 2021, le Maroc se dotera d’un nouveau gouvernement après les élections. Beaucoup de visages sont ainsi enclins au remplacement. Dans l’immédiat, nous pouvons ainsi considérer que les nouveaux ministres n’ont qu’une année et quelques mois pour faire leurs preuves.
A première vue, beaucoup de données annoncent la difficulté de la tâche qui se présente devant les nouveaux ministres. Mais alors, pourquoi avoir annoncé un remaniement avant l’élaboration du modèle de développement et à moins de 2 ans des nouvelles élections qui sont susceptibles de tout bouleverser ? Tout simplement, le remaniement s’imposait. La configuration gouvernementale précédente était une hémorragie qu’il fallait stopper, pas de science infuse pour le remarquer. Il suffit de scruter l’opinion publique autour de l’oeuvre de certains ministres et secrétaires d’Etat sortants, pour y déceler le cri du peuple. En survolant les rapports de la Cour des Comptes, on y épluche tous les motifs du mécontentement royal. Et en descendant à la rue, les manifestations récurrentes entre syndicats, médecins, étudiants, et enseignants, entre autres revendications liées au pouvoir d’achat, témoignent d’inachevés. Surtout après un discours de la Fête du Trône aussi poignant, le changement ne pouvait plus traîner plus longtemps.
De ce fait, nous ne pouvons qu’attendre, et espérer que les nouveaux ministres pourront s’affranchir des obstacles et contraintes qui les ont accueillies à la tête de leurs ministères. De nouvelles déceptions seraient très mal excusées.






