Aujourd’hui, le Maroc se doit de mettre en place un nouveau modèle de développement inclusif, compétitif et faisant du Royaume un véritable pays émergent. Depuis 2014, le Souverain ne cesse de noter que le Maroc manque d’une vision de développement à très long terme, avec des objectifs globaux clairs et partagés, des plans d’action cohérents où moyens et responsabilités sont bien définis.
La rentrée économique approche à grands pas. La note de cadrage pour le projet de loi de Finances (PLF) 2020 a été publiée le 10 août dernier par le chef du gouvernement. Ce document fixe les grandes orientations que devront suivre les départements gouvernementaux dans l’élaboration de leurs budgets. Toutefois, on remarque que ce document n’inclut que les dépenses les plus rigides et par définition difficilement pilotables en gestion.
En effet, selon cette note de cadrage, les dépenses de compensation prévues dans le cadre du PLF 2020 culminent à 13,6 milliards de dirhams. Un système de couverture sera mis en place pour se prémunir contre la hausse des prix des matières premières sur les marchés internationaux.
Cette note prévoit également 9,6 milliards de dirhams qui seront affectés aux régions dans le cadre de l’activation de la régionalisation avancée et de la loi organique y afférente. Les dépenses de l’administration publique seront aussi réduits. Pour cela, la note de cadrage invite les ministres à rationaliser la création des postes budgétaires en optant pour des redéploiements aux niveaux sectoriels et territoriaux et à se concentrer sur leurs missions de base.
Par ailleurs, cette note d’orientation insiste sur l’activation immédiate de la loi-cadre de l’enseignement et de la nouvelle feuille de route de la Formation professionnelle. En matière de couverture médicale, la note de cadrage recommande de corriger les dysfonctionnements du système du RAMED et d’activer l’AMO des indépendants, outre l’extension de l’AMO des étudiants.
Et puisque les TPE-PME représentent plus de 95% du tissu économique marocain, un fort appui sera apporté à ces entreprises. Des mesures seront prises pour réduire les délais de paiement, ou encore l’accélération du remboursement des surplus de TVA pour celles qui déduisent plus de TVA qu’elles n’en collectent.
Jusqu’à présent, le Conseil de gouvernement a approuvé une multitude de décrets pour accélérer la mise en place de ces orientations. En effet, le Conseil de gouvernement a adopté deux projets de décret relatifs à l’application de la loi 98.15 relative au régime de l’assurance maladie obligatoire (AMO) et de la loi n° 99.15 portant création d’un régime de pensions pour les catégories des professionnels, des travailleurs indépendants et des personnes non salariées exerçant une activité libérale.
Il a également approuvé un projet de loi relatif au financement collaboratif qui s’inscrit dans le cadre des efforts et initiatives des pouvoirs publics visant à renforcer l’inclusion financière, notamment parmi les porteurs des petits projets.
Malgré ces efforts et la mise en place de la note de cadrage pour le projet de loi de finances (PLF) 2020, Najib Akesbi, économiste marocain, précise que cette note de cadrage n’inclut que des dépenses rigides. Pour lui, « le pays et l’économie du pays sont en salle d’attente. Les priorités de la nouvelle stratégie du développement ne constituent pas une question liée à la rentrée économique actuelle. Ce qui est demandé maintenant est de réfléchir à de nouveaux choix. Or, le processus qui devrait conduire à ces nouveaux choix n’est même pas encore entamé puisqu’on attend la commission ad-hoc qui sera mise en place à la rentrée ».
Pour l’économiste marocain, cette réflexion devait être menée il y a longtemps. « Le Roi a demandé à ce qu’on réfléchisse à cette stratégie de développement plusieurs fois auparavant, à savoir en 2014 et en 2017. Alors qu’au niveau officiel rien n’a été accompli, un vrai débat a été initié et a eu lieu dans les universités et dans les organisations non gouvernementales« , a-t-il précisé.
Dans le discours du Trône, le Monarque avait rappelé que ces dernières années ont « révélé l’incapacité de notre modèle de développement à satisfaire les besoins croissants d’une partie de nos citoyens, à réduire les inégalités sociales et les disparités spatiales. C’est la raison pour laquelle nous avons appelé à sa réévaluation et à sa réactualisation« . Le Roi avait également annoncé qu’il procédera à son installation à la rentrée prochaine.
M. Akesbi souligne que « tout le monde attend que les prémices du débat puissent avoir lieu pour qu’on commence à voir clair. Ce qui est demandé aujourd’hui ce ne sont pas les recettes, à savoir ce qu’il faut augmenter ou baisser. Ce qui est demandé est de repenser nos choix fondamentaux dans le cadre d’une nouvelle stratégie de développement », a-t-il expliqué.
« Aujourd’hui le plus urgent pour l’économie du Maroc est que la réflexion collective sur les nouveaux choix de développement aboutisse le plus rapidement possible pour que chacun puisse y voir plus clair, pour qu’on ait un nouveau cadre. A partir de ces nouveaux choix, il serait possible de déterminer les instruments de politique publique qui vont permettre d’aller vers la réalisation de ces choix« , fait savoir M. Akesbi.
Ce qui est sûr est le Maroc manque d’une vision de développement à très long terme. Certes, le Maroc dispose de plusieurs stratégies nationales, toutefois, celles-ci peinent à impulser un développement qui profite à tous. En attendant que la commission ad-hoc soit mise en place et que les parties concernées définissent ce nouveau modèle de développement, le débat initié par les universitaires et les organisations non gouvernementales continue.