Le changement à la tête de l’Etat en Algérie pousse le Maroc à espérer une véritable évolution dans le positionnement de son voisin en ce qui concerne l’issue au conflit du Sahara. L’Algérie, qui paraît comme une partie très intéressée au dossier, tout en s’en défendant, voit ses sources traditionnelles de la légitimité s’effondrer. L’élite au pouvoir est consciente de l’importance d’assainir ses relations avec ses voisins, en particulier le Maroc.
La population algérienne a investi la rue pour exiger le départ du régime du président Abdelaziz Bouteflika. Son successeur, Abdelmadjid Tebboune, qui a remporté une élection décriée et controversée, est considéré la nouvelle façade civile du régime politique qui ne veut pas d’alternance et qui règne en maître sur le pays depuis l’indépendance de juillet 1962. Alors que le nouveau chef de l’État algérien a émis des déclarations prometteuses pour rassurer le mouvement populaire et calmer sa fièvre protestataire qui réclame une refonte du système, il semble que Abdelmadjid Tebboune soit incapable de faire front à «l’État profond» qui alimente une politique hostile envers le Maroc.
Tandis que le roi Mohammed VI a appelé l’Algérie, à plusieurs reprises à un retour au dialogue qui pourrait aboutir à une normalisation complète des relations entre les deux pays. Abdelmadjid Tebboune, trop intimement lié au pouvoir décrié pour obtenir la confiance du peuple, a parlé «d’une nouvelle Algérie» et, dans son message de félicitations, le souverain a invité le président algérien «à entamer une nouvelle page dans les relations entre les deux pays voisins».
La plupart des observateurs ne s’attendait pas à ce que le nouveau président algérien annonce un renversement radical de la position de son pays envers le Maroc. Cependant, depuis que l’Algérie a été témoin d’un véritable soulèvement populaire qui a conduit à la fin du régime d’Abdelaziz Bouteflika, le Maroc aspira à une nouvelle ligne qui rompt avec la rhétorique stérile et belliqueuse qui caractérisait les relations de l’Algérie avec le Maroc.
En octobre, une véritable secousse a eu lieu au sein de la classe politique algérienne. Ammar Saadani, ancien secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), a reconnu que «le Sahara est marocain» et que «l’Algérie avait payé le prix fort pour son soutien au Polisario», ajoutant que «les frontières entre les deux pays devaient être rouvertes. »
Saadani est décrit comme étant proche du chef d’état-major militaire algérien, le général Ahmed Gaid Saleh. le landerneau politique algérien parle de discussions persistantes sur le retour imminent de Saadani pour occuper un poste important, ce qui soulève davantage de questions sur la nature de sa position au Sahara et sur le fait de savoir si ses déclarations étaient un message provenant de l’élite algérienne à destination des principales capitales mondiales, en particulier Paris.
L’entretien avec Saadani, qui a commencé sa carrière professionnelle au sein de la Sonatrach, a été publié le 17 octobre, quelques semaines avant la présidentielle. L’ancien président de l’Assemblée populaire nationale algérienne a indiqué que «les relations entre l’Algérie et le Maroc sont plus importantes que cette question (le soutien au polisario)», considérant que l’Algérie, la Tunisie et la Libye traversent des changements importants qui pourraient revitaliser la région Maghreb.
Certains membres du cercle du pouvoir se sont manifestés, considérant le point de vue de Saadani comme une opinion personnelle qui n’engage pas l’État algérien, mais cela ne changerait pas le fait que cette reconnaissance sans précédent de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental par un éminent personnage politique algérien a brisé un tabou et fourni à au président Tebboune l’occasion pour relancer les liens avec le Maroc.
L’Algérie dit s’affranchir de toute ingérence dans les affaires marocaines, mais les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, en particulier la résolution 2494 d’octobre, considèrent l’Algérie comme impliquée dans le conflit et sa solution définitive.
Le Maroc ne peut pas s’attendre à un changement majeur de la position officielle de l’Algérie, inchangée depuis 1975. La «nouvelle Algérie» pour laquelle Tebboune plaide exige de convaincre que son pays se mue pour s’adapter aux effets du soulèvement populaire qui a pris de court le régime qui règne depuis des décennies.






