En 2024, un record d’alertes alimentaires a été enregistré depuis la mise en place du système européen RASFF (Rapid Alert System for Feed and Food). Selon les données publiées, pas moins de 5 364 notifications ont été émises aux frontières de l’Union européenne.
Toutefois, le système européen RASFF, bien que destiné à protéger les consommateurs, a été critiqué pour son rôle «dans la propagation de notiofications souvent qualifiées d’injustifiées, voire fallacieuses.» Le rapport de l’institut Coordenadas de gouvernance et d’économie appliquée souligne que «ces alertes infondées ou intéressées engendrent des préjudices économiques et réputationnels significatifs pour les secteurs et entreprises concernés.» L’institut avertit également que l’exploitation abusive des alertes sanitaires, en particulier celles qui visent les produits provenant du nord de l’Afrique, «pourrait entraîner une hausse généralisée des prix, une réduction des importations et un recul de la production, au détriment des consommateurs européens.»
Les conséquences des fausses alertes sur le secteur agroalimentaire
L’institut Coordenadas condamne aussi «la multiplication des accusations sans fondement de certaines organisations, notamment des associations de consommateurs, des ONG et d’autres entités, qui se positionnent comme des gardiennes de la qualité alimentaire.» Ces pratiques ont, selon l’institut, «conduit à des tensions importantes au sein des secteurs de l’agriculture, de la distribution et de l’alimentation, y compris parmi des multinationales, en raison d’informations souvent dépourvues de base scientifique ou officielle.»
Les représentants de la grande distribution en Espagne ont récemment «alerté sur les “dommages injustifiés” provoqués par des alertes sanitaires “dénaturées”, auxquelles ne succède souvent aucun suivi rigoureux.» Selon leurs déclarations, «nous nous sentons désarmés face à la mauvaise utilisation de l’information sur la sécurité alimentaire dans notre pays.» Cette inquiétude est particulièrement prononcée dans un pays qui figure parmi les principaux producteurs et exportateurs mondiaux de produits alimentaires.
Le cas des fraises marocaines : un exemple emblématique
L’un des épisodes les plus marquants concerne les fraises marocaines, pour lesquelles une prétendue contamination par le virus de l’hépatite avait été signalée via le portail européen des notifications sanitaires. Bien que cette information ait été largement relayée par des médias et des associations agricoles, les investigations conduites par l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires du Maroc (ONSSA) ont rapidement invalidé ces accusations.
L’ONSSA a procédé à des analyses approfondies de l’eau d’irrigation et des fraises en provenance du champ concerné, concluant qu’aucune trace d’hépatite ou de norovirus n’avait été détectée. En outre, le lot incriminé n’a jamais franchi les frontières espagnoles ni atteint la chaîne agroalimentaire européenne, étant destiné à d’autres marchés. Malgré cela, les ventes de fraises dans les supermarchés espagnols ont chuté de 10 % à 15 %, selon les données communiquées par les acteurs du secteur.
L’impact des alertes injustifiées sur les entreprises
Un autre exemple concerne une ONG, l’Observatoire du bien-être animal, accusée de chantage envers certaines marques et enseignes de distribution. L’ONG aurait menacé de diffuser des informations négatives sur leurs produits en cas de refus de collaboration. De plus, une polémique a éclaté lorsque la Agence espagnole de sécurité alimentaire et de nutrition (AESAN) a ordonné le retrait d’un lot de chocolat noir, sur la base d’une plainte unique et d’une photo transmise deux mois auparavant par un consommateur. L’alerte portait sur la présence d’un petit fragment de plastique dans une tablette, provoquant une vague de méfiance injustifiée.
Ces cas illustrent une tendance préoccupante : «les fausses informations et les rumeurs nuisent gravement à la confiance des consommateurs, tout en affectant la chaîne économique, du producteur jusqu’au client final. Les représentants de la distribution alimentaire réclament depuis longtemps un meilleur contrôle des alertes sanitaires afin d’éviter de tels préjudices», selon la même source.
La nécessité de renforcer la confiance dans les contrôles alimentaires
Malgré ces controverses, l’institut Coordenadas insiste sur l’efficacité des systèmes de contrôle en place en Europe. «Les agences telles que l’Aesan en Espagne, le Rasff au niveau européen et l’Infosan au niveau mondial veillent à ce qu’aucun aliment non conforme aux normes strictes ne parvienne aux consommateurs. Ces contrôles rigoureux répondent également aux demandes des agriculteurs européens, qui réclament un alignement des exigences phytosanitaires pour les produits importés sur celles imposées à leurs propres productions», a-t-on noté.
L’institut conclut en mettant en garde «contre les discours nationalistes et les informations biaisées, rappelant que les investissements à l’étranger favorisent non seulement la croissance du PIB espagnol, mais aussi la création d’emplois locaux, contribuant ainsi à la stabilité économique et sociale. Quant aux produits en provenance du nord de l’Afrique, ils répondent pleinement aux exigences les plus strictes imposées par l’Union européenne.»