La ville flottante de Venise réussit progressivement à se redresser et à retrouver son dynamisme après les pires inondations de son histoire, qui, en novembre, avaient entraîné une série inédite de marées hautes, dévastant places, bâtiments et églises historiques, et affectant l’activité touristique, l’épine dorsale de l’économie locale.
Après le choc provoqué par la montée des eaux qui ont atteint un niveau record de 1,87 mètres, emportant les célèbres gondoles de la cité et inondant les hôtels, Venise et ses habitants, dans un grand élan de mobilisation, ont décidé de prendre la situation en main pour sortir en très peu de temps de l’état d’urgence et retrouver le cours normal de leur vie. Cependant, les photos prises de la ville, submergée par les eaux, semblent encore vivaces dans les esprits de nombreux touristes qui rechignent à visiter Venise, une ville habituée à recevoir plus de 36 millions de touristes par an.
Ce recul de confiance des touristes dans la belle ville italienne, a été confirmée par les chiffres. Le président de l’Union des hôteliers de Venise, Vittorio Bonacini, a indiqué que la montée sans précédent de l’eau, connue en Italie sous le nom de phénomène Aqua Alta, a eu de graves répercussions “détruisant complètement l’image touristique” de Venise. “Nous pouvons dire sans la moindre gêne que toutes les réservations d’hôtel ont été annulées de 50% au cours de la période de novembre 2019 à janvier 2020, ce qui représente un coup très dur pour l’économie de Venise. Ces pertes subies par les hôtels ont également causé des dommages sociaux”, a-t-il affirmé.
Il a ajouté, dans une déclaration à la MAP, que jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas eu de changement dans le nombre de réservations, car il n’y a pas tout simplement de nouvelles réservations, et même pendant les mois de mars et avril, la situation restera difficile en raison de la peur persistante de la montée des eaux. Il a expliqué que “lorsque certains touristes pensent à Venise, ils imaginent une ville dangereuse et que la visite est lourde de risques. Toutes ces pensées sont horribles pour nous..” Il a assuré “que seulement dix heures après ce qui s’est passé le 12 novembre 2019, les hôtels ont repris leur travail, les musées et les restaurants ont ouvert leurs portes et la vie est redevenue normale”.
Selon le président de l’Union des propriétaires d’hôtels de Venise, même le carnaval des amoureux avec masques et déguisements, dont les célébrations ont duré deux semaines, a été affecté par le faible flux touristique, le pourcentage de réservations d’hôtel ayant diminué de 10%. “La situation du secteur touristique dans la ville n’est pas au beau fixe”, a-t-il regretté. “Il faut visiter Venise pour s’assurer que ce chef-d’œuvre mondial de l’ingénierie s’est incroyablement rétabli”, a-t-il plaidé.
Au plus fort de la course pour la protection de la ville contre les inondations et la restauration de son éclat touristique, le méga-projet MOSA a vu le jour, un programme d’envergure à tous points de vue, tant en termes de technologies que de coûts. Le projet MOSA, d’un coût de 5 milliards de dollars, est considéré par les autorités locales comme le bouclier décisif contre la marée d’eau. Il s’agit de 80 barrages ou digues de fer au fond de la mer, à l’entrée de chaque canal d’eau de la ville, avec l’objectif de contrôler le mouvement des marées et empêcher les hautes vagues de submerger les rues de la ville d’eau. Ainsi, la hauteur de l’eau devient fixe ou contrôlée exactement comme c’est le cas avec les barrages traditionnels. Dans le cadre des efforts visant à préserver Venise, laquelle est inscrite sur la Liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, des dizaines de conducteurs de gondoles dans la ville participent à une campagne de nettoyage en portant des combinaisons de plongée pour descendre au fond des canaux d’eau afin de collecter les déchets.
Andrea Baldi, le chef des gondoles à Venise, a expliqué que les volontaires collectent quatre tonnes et demie de déchets par an, car ils aiment leur ville, notant que les gondoles qui ont suivi une formation de plongée au fond du canal d’eau font ce travail volontairement et gratuitement. Pour Massimiliano De Martine, qui est en charge de l’environnement et de l’urbanisme, les touristes sont un pilier de l’économie vénitienne, mais ils doivent aussi beaucoup aux 260.000 habitants de la ville. Martine insiste dans ce sens sur l’importance de garder la ville propre. “Je prie nos invités de dire merci … non pas par les mots, mais par leur comportement et en faisant attention à ne pas jeter les déchets”.
Le conseil municipal va plus loin, en distribuant des plans de ville qui contiennent des instructions très claires, comme l’interdiction de manger assis par terre ou de s’allonger sur des ponts ou des monuments. En cas de violation des règles établies, une amende de 100 à 200 euros est infligée aux contrevenants. Ces amendes s’élèvent parfois à 350 euros en cas de jets de déchets par terre.