Zineb El Rhazoui, l’ex-journaliste virée de Charlie Hebdo, occupe le devant de la scène depuis de nombreuses années autour des thèmes d’identité, de subjectivité, d’islamisme, d’altérité, de voile. Ces déclarations sur le malaise social qui s’est installé entre les minorités et la police en France ont offusqué l’opinion publique.
Le 5 novembre, dans L’heure des pros, émission de débat de la chaîne de télévision française d’information en continu CNews, l’ancienne journaliste Zineb El Rhazoui, qui s’exprimait sur les violences urbaines et les conflits impliquant des populations issues de l’immigration dans les quartiers populaires, a déclaré que la police «devait tirer à balles réelles sur les jeunes de banlieue», référence aux événements qui ont éclaté le 24 octobre dans la commune française du département des Yvelines et de la région Île-de-France, Mantes-la-Jolie. Les tensions sociétales se résolvent à partir d’une procédure universelle de discussion qui doit aboutir à un consensus, El Rhazoui appelle au massacre et au meurtre. Vexés et scandalisés ses collègues sur le plateau, eux, ont appelé à déployé des dispositifs de prise en charge des populations les plus démunies dans les quartiers défavorisés de la République.
Il n’est guère de semaine sans que Zineb El Rhazoui prouve son incapacité à assumer le jeu du débat démocratique à travers des positions trop enclines à pactiser avec le courant extrême. Elle piétine les principes qui emportent comme corollaire la neutralité de l’État, fait partie des acteurs impliqués ayant politisé la question du voile et problématisé l’intégration des femmes musulmanes au sein de la société française, en transformant cyniquement des faits fragmentaires ou circonstanciels en un problème structuré et significatif. La provocation est une stratégie opportuniste de cette «militante». Narcisse en mal de reconnaissance, faussaire sans morale, elle prétend sans cesse parler la langue de la République et de défendre ses valeurs, alors, qu’en vérité, ses déclarations consacrent une séparation de fait des catégories populaires, fragmentée en deux types : les Français de longue date désormais relégués dans les régions périurbaines et rurales ; et les immigrés récents ayant investi les banlieues intégrées aux villes-centres. Son statut de « femme menacée » lui a permis d’acquérir des rentes de situation dans l’appareil médiatique français et une exposition sans commune mesure avec son influence réelle.
La France est engluée dans un contexte idéologique délétère. Entre les débats qui prennent souvent des allures morbides au sujet des femmes musulmanes affichant le souhait de se couvrir la tête dans la sphère publique, et entre la vieille fascination de certaines composantes politiques pour la culture de la marge et de la minorité, le pays de Voltaire se meurt de ses divergences ethniques, communautaristes et religieuses, tenues pour négligeables il y a quelques années, et qui ont brisé la centralité des questions sociétales.
Les parallèles et les contrastes sont criards. Alors que la Suède -à titre d’exemple et ce n’est pas la seule en Europe ni dans le reste du monde-, constitue un modèle intégratif et consensuel, corporatiste et spécifique, affichant un haut degré d’ouverture sur ses composantes, la France, elle, tente de développer une législation coercitive visant l’interdiction complète du voile dans la sphère publique. D’autres pays voisins, n’ont pas instauré de réglementation sur la question. La France assimilationniste ne parvient plus à gérer les particularismes identitaires (ethniques, religieux ou de genre) dans la sphère publique, tandis que les autres pays garantissent une tolérance vis-à-vis de la diversité culturelle et religieuse dans la vie publique. C’est la défaillance d’une perception de la nation, dont la cohésion ne s’organise plus autour d’un socle de valeurs communes mais autour d’arrangements politiciens. Les débats politiques houleux sur le voile, en plus de démontrer l’échec de l’inclusion sociale de différentes catégories de citoyens en France, pourfendent les migrants, les croyants et les femmes.
Uniquement en France, au lieu d’adopter une politique d’accommodement relative au port du voile, on y voit apparaître un “cadre” qui marginalise l’idée de neutralité, à la faveur d’une problématisation qui accentue déconsidèrent la question du genre, la diversité culturelle et la tolérance. Face aux jeunes frustrés qui refusent de plus en plus souvent de se plier devant l’autorité instituée – Zineb El Rhazoui déclare que les conduites transgressives doivent être punies par les armes pour maintenir l’ordre social et sa cohésion. S’agissant du voile, « signe et symbole de l’enfermement et d’asservissement de la femme », elle fait partie de ce courant d’opinion qui s’était manifesté en faveur de son interdiction du dans les établissements officiels et même dans la sphère publique. Pluralisme, démocratie discursive, autonomie des cultes et neutralité de l’État ? Elle n’en a cure.